On idéalise trop Mai 68, mais comment minimiser un mouvement réunissant 10 millions de Français

Gérard Miller, psychanalyste et professeur à l'université Paris 8, co-fondateur et membre du comité de pilotage de la web-télé Le Média, était l’invité de Radio Brunet ce mercredi. Au lendemain des manifestations du 1er-Mai émaillées de quelques violences à Paris qui ont dévié l’attention au but de cette journée de contestation, l’auteur a livré ses impressions sur la contestation sociale de 2018, que beaucoup comparent à mai 68.
SI Eric Brunet estime que cela n’a rien à voir avec mai 68, Gérard Miller n’est pas loin de le rejoindre sur ce point, même s’il assure qu’il voit dans cette mobilisation "des choses intéressantes".
Alors qu'Eric Brunet se demande, non sans une touche de provocation, si mai 68 n’avait peut-être été qu’une révolte comme tant d’autres qu’a connu la capitale, Gérard Miller concède que mai 68 est une référence qui a certainement été trop utilisée, mais qui reste indélébile.
"Mai 68 est devenu un mythe (...) mais on a besoin de mythes !"
"Là où vous avez raison est qu’on idéalise mai 68. Mai 68 est devenu un mythe, et il a été presque un mythe tout de suite. Mais ce n’est pas 'mal' d’être un mythe. On a besoin de mythes ! Donc il est vrai que les gens racontent parfois des choses sur mai 68 qui peuvent ne pas être exactes. Mais ne sous-estimez pas le fait que mai 68 s’inscrit dans l’histoire de France comme 1936, ou pourquoi pas 1789."
Le psychanalyste rappelle l'importance qu'ont prises les grèves ouvrières de l'époque, dans une contestation qui ne se résume pas à la révolte étudiante parisienne.
"Comment peut-on sous-estimer un mouvement de 8 ou 10 millions de personnes"
"Et surtout, c’était la plus grande grève ouvrière de l’histoire. Donc rien que ça, si vous voulez mettre de côté les petits bourgeois du quartier latin qui parfois reçoivent des pavés de la presse depuis 50 ans, c’est la plus grande grève. Si c’est un où même les flics ont fait grève", glisse avant de raconter une anecdote d’un CRS réclamant les mêmes conditions de douche que pour les gendarmes mobiles, et l’obtenant grâce à la grève.
"Les footballeurs ont fait grève, les infirmiers, les étudiants tout le monde ! Vous ne pouvez pas sous-estimer un mouvement de 8 ou 10 millions de personnes. Comment peut-on ? C’est impossible."