Quand on est papa, on veut pouvoir prendre un congé parental pour soutenir sa compagne

- - AFP
David 34 ans, masseur, praticien en bien être. Papa d'une petite fille depuis le mois d'avril, il a pris un congé parental à mi-temps de six mois. Il a ces jours-ci décidé de le prolonger d'une année supplémentaire.
"La première raison pour prendre ce congé parental, c'était l'envie d'être en soutien de ma compagne. On ne pouvait pas forcément compter sur d'autres personnes pour nous aider et lui permettre de nous aider. Donc j'ai pris six mois au début, à mi-temps. Et comme on a le droit de le prolonger deux fois, j'en ai encore pour un an.
Si on envisage avec lucidité ce que sont les premiers mois d'un enfant, ça ne marche pas de dire à une personne de rester tout seul à la maison. Avoir une grossesse, accoucher, s'occuper d'un bébé, c'est épuisant, c'est un marathon. Elle a donc pris son congé maternité et j'ai pris mon congé parental tout de suite après la naissance, collé à mon congé paternité. D'ailleurs, dans la nouvelle législation, on est obligé de le prendre dans la foulée si on veut qu'il soit rémunéré. Même si la rémunération de la CAF pour un congé parental, ce n'est pas non plus un montant hallucinant: en temps total on est autour de 350 euros par mois. Moi j'ai divisé mon salaire par deux, et j'avais le plus important du couple.
"Il faudrait créer un congé paternité qui soit un équivalent au congé maternité"
Il y a des gens qui ne peuvent pas se le permettre. Il y a peut-être des villes où c'est possible de vivre avec 300 euros par mois. Mais à Paris c'est strictement impossible, ou alors il faut avoir prévu d'avoir un enfant 10 ans à l'avance pour avoir mis de l'argent de côté. Il faudrait créer un congé paternité qui soit un équivalent au congé maternité. Quelque chose qui soit une étape de la vie de l'homme dans son entreprise. Avec la prise de conscience que la présence des deux parents à domicile, c'est une chance.
Je travaille dans un spa, je travaille avec des femmes. Elles sont toutes passées par la maternité, donc j'ai bénéficié d'une écoute positive. Mais j'entends que certains hommes redoutent de dire à leur patron qu'ils ne vont pas être là pendant 6 mois. L'inégalité homme-femme dans le monde du travail n'est pas dû qu'à la différence de salaire, mais aussi à cette question qui peut tomber à n'importe quel moment: avez-vous des enfants? Avez-vous prévu d'en avoir? Ce n'est pas logique dans le monde actuel qu'il n'y ait que la femme qui puisse être perturbée par cette question-là.
"S'occuper d'un bébé toute la journée, c'est costaud"
Pendant les quatre ou cinq premiers mois dans l'enfant, tu ne dors plus beaucoup, les deux parents sont crevés. S'occuper d'un bébé toute la journée, c'est costaud. Il y a un moment, aller au boulot ça devient une respiration. Ton rythme est calé sur celui de l'enfant, il y a toute la partie logistique et administrative du foyer. Toute cette partie cachée du travail des femmes que nous on ne voit pas depuis des centaines d'années: le ménage, les repas, les courses… Et ça c'est éprouvant.
Habitant à Paris, les places en crèches sont rares. On habite dans une ville du Grand Paris où il y a eu un arrivage massif de jeunes parents mais les places en crèches n'ont pas augmenté. Le congé parental devient un mode de garde comme un autre. Il y a des gens qui justifient le fait de ne pas prendre de congé parental par le fait qu'ils ont une rémunération confortable. Mais parfois, la moitié du salaire passe dans la nounou.
"Quand je ne vois pas ma fille pendant trois jours, j'ai loupé pleins de trucs"
C'est un peu particulier. On finit par avoir des jeunes parents, et donc souvent des papas, qui en fait ne voient jamais grandir leur enfant. Ils sont toujours gardés par quelqu'un d'autre. Au niveau du lien affectif, c'est particulier. Moi, quand je ne vois pas ma fille pendant trois jours, j'ai loupé pleins de trucs. Pour un peu qu'on termine tard, on ne voit jamais son enfant.
L'autre raison qui justifie ce choix, c'est d'avoir vu tous ces parents qui se séparent lors de la première année de l'enfant. C'est quand même effrayant. La maman se sent avoir un rôle plus privilégié, mais pour l'homme la prise de conscience arrive à la naissance. S'il n'y a que la maman à la maison, qui change le bébé, qui comprend ses pleurs, etc… Le truc dont je suis super content, c'est de voir qu'avec ma fille, elle est en confiance avec les deux et de façon parfaitement égale. Et que ma femme a confiance en moi".