Casinos en ligne, addiction sous-estimée? "J'ai perdu 60.000€, mais voir sa mère pleurer, ça calme"

Légaliser les casinos en ligne afin de récupérer des recettes fiscales? Un amendement a été déposé en ce sens dans le projet de budget, alors que le gouvernement est à la recherche de 60 milliards d'euros d'économies. L'amendement a été déposé en vue d'une "mise en cohérence du cadre des jeux avec nos principaux voisins européens, la France étant, avec Chypre, le seul pays de l'Union européenne à interdire les jeux de casino en ligne", comme l'indique le texte de cet amendement déposé samedi dernier.
Le gouvernement vise ainsi officiellement à "limiter l'impact sur la santé publique des consommateurs de jeux en ligne" et "contrôler cette offre de jeux qui ne cesse de croître". Mais force est de constater que la pratique fait des ravages.
"Je gagne entre 3.000 et 4.000 euros par mois mais tout part dans le casino"
Fabio a 27 ans et a témoigné de sa situation personnelle ce vendredi dans Les Grandes Gueules. Il explique avoir trouvé le goût du jeu en commençant par aller au casino physique. Après avoir gagné un peu d'argent, il a ensuite découvert les casinos en ligne, dont certains restent accessibles malgré leur interdiction en France.
"On vit dans une génération où les jeunes ne savent plus s'arrêter", alerte Fabio. "J'ai souvent eu de la chance mais en ligne c'est 24h/24h ça n'arrête jamais. C'est ça le plus fou et qui m'a fait perdre des mises considérables", analyse-t-il sur RMC et RMC Story.
"J'ai dû perdre entre 40.000 et 60.000 euros", concède-t-il.
"Ma mère quand elle a vu les sommes que je perdais elle allait s'évanouir", poursuit-il, avant d'expliquer que c'est "voir sa mère pleurer devant soi" qui l'a poussé à s'arrêter et se soigner.
"Je gagne entre 3.000 et 4.000 euros par mois mais tout part dans le casino. C'est une addiction qu'on sous-estime beaucoup comparé à la drogue et l'alcool", compare-t-il.
"Envoyer ce signal de le légaliser" est pour lui donc une hérésie. Une opinion qu'il n'est pas seul à partager. Les machines à sous présentent en effet un "risque d’addiction car ce sont des jeux à résultat immédiat", ce qui "incite le joueur à enchaîner les parties", selon le site officiel joueurs-info-service qui dépend de ... Santé publique France.
"Les intérêts économiques semblent une nouvelle fois primer sur les questions de santé"
Les associations d'addictologie n'en croient pas leurs yeux et multiplient les communiqués implorant le gouvernement d'y réfléchir à deux fois. La Fédération addiction par exemple a exprimé sa "surprise" de voir cet amendement du gouvernement pris "à la va-vite" sans concertation. Ils réclament la suppression du texte et l'ouverture d'une vraie discussion sur le sujet avec l'ensemble des acteurs du secteur.
Ironie de l'histoire, le dépôt de cet amendement intervient alors même que l’Autorité nationale des jeux vient de lancer début octobre... une campagne de prévention sur les casinos en ligne.
"Cela interroge sur les priorités politiques du gouvernement : les intérêts économiques semblent une nouvelle fois primer sur les questions de santé", tacle l'association.
Inquiets pour d'autres raisons, une centaine de maires ont quant à eux publié jeudi une tribune demandant au Premier ministre de ne pas autoriser les casinos en ligne par voie d'amendement "sans concertation", estimant que des milliers d'emplois sont en jeu.
En attendant, pas de réaction officielle du gouvernement sur la question.