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“Être gros ou mince, c’est subjectif”: le poids, un marqueur social historique

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D’après un rapport, 6 adultes sur 10 et un enfant et un adolescent sur trois seront obèses ou en surpoids d’ici à 2050. Et pour l’écrivain Arthur Chevallier, au-delà de la question médicale, notre rapport au poids varie beaucoup selon les époques.

Être gros ou mince, c’est subjectif. Les critères de ce qui est beau ou de ce qui ne l’est pas, ça varie d’un siècle à l’autre. Aujourd’hui, on valorise beaucoup la minceur, mais ça n’a pas toujours été le cas. Et d’ailleurs, ça pourrait encore changer. Il y a eu une époque où être bien en chair, c’était mieux que d’être mince. Au Moyen Âge par exemple, être gros, ce n'était pas du tout discriminant. Et ça s’explique.

À l’époque, les famines et les épidémies comme la peste faisaient des ravages. Forcément, tout le monde ne mangeait pas à sa faim. Donc être gros, c’était être en bonne santé, robuste et puissant. Le Moyen Âge, c’était aussi la mode des grosses bouffes entre chevaliers: on ripaillait et on buvait en quantité industrielle. D’ailleurs, l’animal qui incarne la force à l’époque, c’est l’ours.

Quand est-ce qu’on se met à valoriser la minceur?

Ça vient avec la modernité. Plus on se rapproche de notre époque, plus il faut être mince. À partir de la Renaissance, l’embonpoint devient un sujet de moquerie. Attention, être trop maigre, c’est pas bien vu non plus. Ça renvoie à un état de faiblesse. Tout est une question d’équilibre Mais ça change à partir du XVIIe siècle. Être trop gros, c’est être impotent, incapable si vous préférez.

Donc, on imagine des remèdes contre la prise de poids: on boit du vinaigre ou du citron. On commence aussi à porter des corsets pour être élégant dans ses vêtements. Bref, c’était surtout esthétique. Ça vaut pour les femmes et pour les hommes. Même si on était plus exigeants avec les femmes.

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Chevallier remonte le temps : Evolution de la perception du poids à travers les âges - 06/03
3:12

Mais est-ce qu’on se pesait par exemple?

Alors faire attention à son poids, ça commence au XVIIIe. Les pesées arrivent chez les particuliers. La question du poids commence à être traitée de façon médiale. Par exemple, d’après L’Encyclopédie, le poids idéal d’un homme d’1m80, c’est 90 kilos. Et au XIXe siècle, alors là, être gros, ça n’est plus bien vu du tout. Les gros ventres, ça fait bourgeois, balourd, paresseux, ringard. Idem pour la mode vestimentaire. On aime les silhouettes élancées et sportives.

Et le XXe siècle, c’est le siècle de la malbouffe. On se rend compte que l’obésité favorise plein de maladies, parfois mortelles. Donc être mince, c’est plus seulement une question de style, c’est une question de santé publique. D’où les politiques de lutte contre l’obésité.

C’est surtout une question médicale finalement. Lutter contre l’obésité pour protéger les gens, c’est normal. Mais faire croire que le monde appartient aux gens minces, c’est ridicule et faux. Nos représentations sont le reflet des clichés qu’on a en tête. Par exemple, pendant la Seconde Guerre mondiale, toute l’Europe se moquait du poids de Winston Churchill. Il pesait 100 kilos pour 1m68. Ça ne l’a pas empêché d’avoir du succès avec les femmes et de finalement remporter la Seconde Guerre mondiale.

Arthur Chevallier