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Les médicaments contre Alzheimer sont inefficaces: "C'est une idiotie sans nom de dire ça"

La maladie d’Alzheimer est une lente dégénérescence des neurones, qui débute au niveau de l’hippocampe puis s’étend au reste du cerveau.

La maladie d’Alzheimer est une lente dégénérescence des neurones, qui débute au niveau de l’hippocampe puis s’étend au reste du cerveau. - - iStock - dolgachov

TEMOIGNAGE - Colette Roumanoff, dont le mari est mort l'an dernier des suites de la maladie d'Alzeihmer, témoigne ce vendredi sur RMC de l'intérêt des médicaments dans l'accompagnement du malade alors que la Haute autorité de la Santé a estimé mercredi que ceux-ci, faute d'efficacité, ne devraient plus être remboursés par la Sécurité sociale.

"Mon mari a vécu avec cette maladie pendant 10 ans et nous avons vécu heureux avec cette maladie. C'est pourquoi j'ai écrit un livre (Le bonheur plus fort que l'oubli, ndlr) dans lequel j'explique comment on peut tout à fait traiter autrement qu'on ne le fait d'habitude un malade d'Alzheimer, de façon à lui garder une vie intéressante. Et pour cela, le fait de prendre des médicaments aide.

Au début, mon mari se perdait même dans la rue dans laquelle on habitait. A partir du moment où il a pris l'Aricept (un des médicaments visés par la Haute autorité de la Santé, HAS ndlr), il ne se perdait plus dans cette rue-là, il pouvait aller plus loin. Il marchait entre deux et quatre heures tous les jours. Il a développé des stratégies à lui, qui lui permettaient à sa façon de se repérer. Il a gardé une autonomie intéressante pendant plusieurs années. Il a pris ce remède pendant cinq ans.

"Je reprenais les médicaments et son état s'améliorait"

Après, il lui est arrivé une aventure très pénible. Il a été 48 heures à l'hôpital où on lui a donné des calmants. Ce qu'on ne devrait jamais faire. Ça devrait être interdit de donner des calmants à un malade d'Alzheimer. Il a donc perdu toute son autonomie en 48 heures.

Ensuite, il a pris un autre remède, l'Ebixa (lui aussi dans le viseur de l'HAS, ndlr), qui l'a aussi beaucoup aidé. De temps en temps, comme on disait que ces médicaments ne marchaient pas, j'essayais d'arrêter. Mais je voyais que la situation empirait donc je reprenais les médicaments et son état s'améliorait. J'ai fait ça plusieurs fois pendant ces dix ans et ce n'est que la dernière année qu'il n'a pris aucun remède parce que ça ne faisait effectivement plus aucun effet.

La maladie d'Alzheimer est une maladie qui n'est pas une et indivisible. C'est une maladie dans laquelle il y a au moins 70 stades et qui est très différente suivant la façon dont le malade est entouré et de l'environnement dans lequel il vit. Il est évident que les malades qui sont enfermés toute la journée, qui restent devant la télé, si on leur donne des médicaments ou non la différence est nulle. Il est certain que si quelqu'un s'imagine que le médicament, en lui seul, va faire de l'effet, ce n'est pas vrai. Le médicament fait de l'effet à condition qu'il y ait un accompagnement. Il faut que le malade ait une vie intéressant, qu'il fasse des tas de choses. A ce moment-là, les médicaments sont extrêmement intéressants.

"Du cas par cas"

La plupart du temps, les gens luttent contre Alzheimer avec des calmants. Ils attaquent énormément l'état du cerveau des malades. A ce moment-là, on peut leur donner n'importe quoi ça ne fait plus d'effet. Si mon mari n'avait pas eu ces médicaments pendant des années, il n'aurait pas eu la vie aussi confortable qu'il a eue. C'est sûr et certain.

En revanche, ces médicaments ont souvent des inconvénients désagréables. Il y a des gens qui ne les supportent pas parce qu'il y a non seulement des neurones dans le cerveau mais aussi dans les intestins. Cela peut donc créer des problèmes, et mon mari en a eu. Mais, quelque part, il les supportait quand même. C'était donc mieux qu'il ait ces petits dérangements intestinaux et qu'il puisse se repérer de façon plus fluide, plus facile dans la vie ordinaire. C'est une question de cas par cas. Mais de dire comme ça, qu'en général, ces médicaments ne font rien, c'est vraiment une idiotie sans nom".

Maxime Ricard avec Pierre Rigo