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Loi fin de vie: faudrait-il un "délit d'incitation" à l'aide à mourir face au "délit d'entrave"?

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L'ancienne ministre de la Santé et député de Seine-Maritime Agnès Firmin Le Bodo a regretté, mercredi sur RMC, l'absence de délit d'incitation pour contre-balancer le délit d'entrave dans le texte sur l'aide à mourir, adopté par l'Assemblée.

L'Assemblée nationale a adopté, mardi, les deux textes de loi sur la fin de vie. De nombreuses conditions ont été désignées pour bien cadrer l'aide à mourir. Ces dernières devront être vérifiées par un médecin. Si le professionnel de santé autorise l'aide à mourir, le patient doit encore confirmer sa demande après un délai de réflexion.

Si la décision est confirmée par le patient, il devra lui-même s'administrer la substance létale, sauf s'il est en incapacité de le faire, "c'est-à-dire soit qu'il ne peut pas du tout tourner une molette, soit s'injecter une substance", précise sur RMC l'ancienne ministre de la Santé Agnès Firmin-Le Bodo.

Le délit d'entrave ajouté au texte

Un délit d'entrave a été ajouté au texte, samedi 24 mai par les députés. "Le délit d'entrave ne faisait pas partie du texte original que j'avais écrit. C'est un amendement LFI qui a fait entrer ce délit d'entrave dans la loi", rapporte Agnès Firmin Le Bodo au micro d'Apolline Matin.

Ce délit est similaire au délit d'entrave aux interruptions volontaires de grossesse (IVG). Il sera constitué en cas de perturbation de l'accès aux lieux où est pratiquée l'aide à mourir et punira toute personne qui exercera "des pressions morales ou psychologiques", "en formulant des menaces ou en se livrant à tout acte d'intimidation" vis-à-vis des patients ou des professionnels de santé.

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"Le délit d'entrave, ce sont des associations qui viennent peinturlurer le cabinet médical. Je pense qu'il faut vraiment être très vigilant sur ce qu'on dit, ce qu'on fait sur la loi", explique l'ancienne ministre de la Santé. Les députés ont également alourdi la peine prévue pour ce délit, la portant à deux ans de prison et 30.000 euros d'amende, pour la calquer sur celle concernant l'IVG.

L'absence d'un délit d'incitation comme pour l'IVG

Mais la députée de Seine-Maritime Agnès Firmin Le Bodo "regrette qu'en face de ce délit d'entrave, nous n'ayons pas inscrit le délit d'incitation". Elle aurait aimé que le texte sur l'aide à mourir se calque également sur la loi relative à l'IVG, dans laquelle il existe un délit d'incitation.

"Le délit d'incitation à l'avortement est puni de deux ans de prison et de 30.000 euros d'amende. L'incitation est caractérisée cumulativement par une pression psychologique culpabilisante et par la délivrance d'information non objectives", détaille la loi sur l'IVG.

Agnès Firmin-Le Bodo aurait aimé ajouter la même chose au texte sur l'aide à mourir: "Le délit d'incitation c'était vraiment quelque chose de majeur parce que ça respectait l'équilibre et cette ligne de crête entre le choix du malade et le respect du corps soignant." "Je pense qu'il faut ni empêcher, ni inciter", a jugé, de son côté, le député MoDem Cyrille Isaac-Sibille.

La ministre de la Santé Catherine Vautrin a balayé le délit d'incitation en assurant que l'arsenal répressif permettait "déjà de couvrir totalement le risque de pressions et de manoeuvres". Elle a notamment cité l'abus de faiblesse.

Tanguy Roman Clavelloux