TikTok: Martine Brousse pas convaincu par le "délit de négligence numérique" pour "les parents irresponsables"

La commission d’enquête sur TikTok a rendu jeudi ses conclusions: interdire l’accès aux réseaux sociaux aux moins de 15 ans et instaurer un “couvre-feu numérique” pour les 15-18 ans, afin de protéger les jeunes d’un “piège algorithmique” jugé dangereux. Déjà évoquée par l’Élysée, cette interdiction constituerait, selon la rapporteure Laure Miller (EPR), “un signal envoyé aux enfants comme aux parents: avant 15 ans, les réseaux sociaux ne sont pas anodins”.
Depuis mars, les députés ont auditionné familles de victimes, influenceurs et dirigeants de plateformes pour décortiquer le fonctionnement de TikTok. Leur constat: “un océan de contenus néfastes”, mêlant promotion du suicide, incitation à l’automutilation et images violentes, renforcés par des algorithmes enfermants.
Pour Arthur Delaporte (PS), président de la commission, “le constat est sans appel”. Le député accuse TikTok d’avoir “délibérément mis en danger la santé et la vie de ses utilisateurs” et a saisi la justice pour de possibles infractions pénales et parjure des dirigeants.
Parmi les mesures avancées: un couvre-feu numérique interdisant l’accès aux réseaux sociaux entre 22h et 8h pour les mineurs, une campagne nationale de prévention, ainsi que la création d’un “délit de négligence numérique” visant les parents jugés irresponsables.
Un débat qui divise
Ces propositions ont immédiatement suscité de vives réactions. Dans l’émission Estelle Midi, Elise Goldfarb a dénoncé “une hypocrisie sans nom” de la classe politique mais aussi des mesures “impossibles”, tandis qu’Estelle Denis rappelait que “les parents, eux aussi, passent leur temps sur leur téléphone”.
"Est-ce que ce n'est pas aussi le rôle des parents? Aujourd'hui, il y a le fait que, nous, parents, on passe notre temps sur le portable et on n'interdit plus à nos enfants le téléphone portable", dénonce la présentatrice.
Martine Brousse, présidente de l’association La Voix de l’enfant, plaide pour une approche plus équilibrée: “Oui, il faut interdire aux plus jeunes, mais aussi prévenir, accompagner, éduquer”.
“On a un véritable problème avec les adultes aussi, on parle constamment des mineurs, des enfants, des adolescents etc, mais quand on voit les adultes, ça fait peur aussi. Quand on voit les politiques, les parents et autres qui passent leur vie sur les réseaux, c’est hypocrite de dire aux tout petits de pas aller sur les RS quand eux y sont constamment”, poursuit-elle.
“Ce n’est pas juste"
Les plateformes sont également “irresponsables” pour Martine Brousse: “il faut aller jusqu’au bout, il faut poursuivre et déposer plainte pour les mettre face à leur responsabilité.”
Pour elle, les responsabilités sont donc partagées entre les adultes et les plateformes. La présidente de l’association “La voix de l’enfant” n’est toutefois pas en accord avec toutes les recommandations de la commission, comme la création d'un "délit de négligence numérique" pour "les parents irresponsables".
“Ce n’est pas juste. Prenons l’exemple de votre auditrice Julie, qui est venue témoigner. Cette mère célibataire a expliqué qu’elle interdisait les réseaux à sa fille, mais son père, lui, l’autorise. Comment on pénalise à ce moment là?”, questionne-t-elle.
De son côté, TikTok a "catégoriquement" rejeté jeudi "la présentation trompeuse" de la commission d'enquête parlementaire. Les députés cherchent "à faire de notre entreprise un bouc émissaire face à des enjeux qui concernent l'ensemble du secteur et de la société", a déclaré un porte-parole de TikTok, ajoutant que la plateforme mène "depuis longtemps une politique exigeante en matière de sécurité et de protection de ses utilisateurs", notamment les adolescents.