Faut-il interdire les voitures puissantes aux conducteurs inexpérimentés? "Il est urgent d'agir"

"Le risque est trop grand". La sénatrice socialiste Audrey Linkenheld propose d'interdire la conduite des voitures surpuissantes aux conducteurs inexpérimentés qui ont moins de 3 ans de permis.
Cette proposition est mise sur la table dix jours après un accident mortel dans le centre-ville de Lille, où une étudiante de 23 ans a été fauchée sur un passage piéton. La jeune femme a été percuté par une voiture de 300 chevaux qui roulait à une vitesse de 100 km/h, alors que la portion était limitée à 30 km/h. Au volant, un jeune de 18 ans, qui a depuis été mis en examen.
Un phénomène nouveau
"C'est ce qui me fait dire qu'il faut mieux réguler ces nouveaux comportements routiers à risque, il y avait eu d'autres accidents avant. Cette proposition était déjà prête au moment de l'accident mais c'est un exemple de plus, qui montre qu'il est urgent d'agir", commente la sénatrice, invitée de Charles Matin, mercredi sur RMC et RMC Story.
Parmi ceux qui ont alerté Audrey Linkenheld, Franck Gherbi, le maire d'Hellemmes, une commune de la métropole lilloise, dénonce le phénomène depuis des années:
"Dernièrement, il y a eu un accident où un enfant a été percuté par un véhicule dans un virage, le mobilier urbain qui a été cassé, et on voit que c'est parce que le conducteur a loupé son virage à cause de la puissance de son véhicule."
Dans cette commune, Madgid dirige une agence de location de véhicules de sport, où il interdit certaines voitures aux jeunes de moins de 21 ans. "C'est souvent les jeunes qui cassent parce qu'ils n'ont pas l'expérience sur l'autoroute ou avec des véhicules qui ont beaucoup de chevaux", explique le vendeur, favorable à cette proposition.
"Ne pas stigmatiser une génération"
Pourtant dans cette dernière, il n'y a pas de limite d'âge. Le texte, qui prévoit une modification dans le code de la route pour "interdire la conduite, la location et la vente de véhicules surpuissants, dont il faudra donc fixer la limite", concerne tous les conducteurs, quelque soit leur âge, encore dans la période du délai probatoire. Cette dernière correspond la plupart du temps à une période de 3 ans après l'obtention du permis.
"L'idée n'est pas de stigmatiser une génération en particulier, le texte dit bien les conducteurs inexpérimentés. C'est vraiment l'expérience qui fait la différence", souligne Audrey Linkenheld.
La sénatrice socialiste estime qu'il s'agit "d'un phénomène de société qu'on constate depuis plusieurs années". "C'est tentant quand on vient d'avoir son permis, on a peut-être l'enthousiasme de la nouveauté", estime-t-elle. Cela rappelle un souvenir à Fabien, gérant d'une auto-école à Hellemmes: "J'ai déjà recroisé un élève au volant d'une AMG GT quelques semaines après l'obtention de son permis. Ça reste un peu impressionnant de voir quelqu'un qui a 15 jours de permis conduire une voiture de 500 chevaux."
"La loi est là pour fixer un cadre, après elle ne peut pas faire évoluer tous les comportements individuels"
Ce genre de comportement représente trop de risques selon Audrey Linkenheld "pour les conducteurs eux-mêmes, mais surtout pour tous les usagers de la route, en particulier les piétons."
La sénatrice s'est également défendu des potentielles critiques qui pourraient être émises à l'égard de sa proposition: "La loi est là pour fixer un cadre, pour fixer une régulation, après elle ne peut pas faire évoluer tous les comportements individuels. Il y aura toujours des gens peu expérimentés qui conduiront très bien, et des gens très expérimentés qui conduiront très mal."
Ouverte aux débats, avec une proposition qui "peut être améliorée, évoluée", Audrey Linkenheld espère qu'elle obtiendra un créneau "d'ici l'été" pour la présenter au Parlement. Pour Philippe Tabarot, le ministre des Transports, interrogé sur BFMTV, mercredi, "la question se pose", surtout au regard "des millions de morts chaque année dans le monde entier" sur les routes.