"On est suspicieux et on regarde chaque personne", confie un conducteur de métro à Bruxelles

Des soldats devant la gare de Bruxelles-Central - Aurore Belot-AFP
La vie a repris à Bruxelles deux jours après les attentats qui ont fait au moins 31 morts et près de 300 blessés dans la capitale belge. Mais une vie qui n’est plus vraiment la même. Le métro a partiellement rouvert dès le lendemain de l'attaque qui s'est déroulée au niveau de la station Maelbeek, au cœur du quartier européen. Mais les stations qui sont ouvertes sont protégées par des militaires et des policiers. Et les passagers ne peuvent y pénétrer qu'après avoir été fouillés.
Une partie des conducteurs a repris le travail dès hier. Mais environ 40% d'entre eux n'ont pas trouvé la force de venir. Ils sont particulièrement choqués. C'est le cas de Saïd, qui a repris le travail dès le lendemain des attaques. Mais pour lui, rien n'est comme avant.
"On va au travail, mais pas comme autrefois, témoigne-t-il pour RMC. C'est-à-dire avec un risque qu'on n'avait jamais anticipé, jamais envisagé. Cette crainte de se dire et si ce n'était pas fini, et s'il y avait autre chose."
"Je ne peux pas m'empêcher d'être un peu plus vigilant"
Un drame qui continue de l'habiter. "Systématiquement, par expérience, on se faisait des scénarios: s'il y a un incendie, s'il y un dégagement de fumée, s'il y a un suicide, comment on va réagir, qu'est-ce qu'on va faire, et on se prépare. Mais aucune personne ne s'était préparée à ce qui est arrivé."
Tout comme Nordine, qui, à présent, roule au ralenti en approchant du quai. "Avec ce qu'il s'est passé, on a l'œil suspicieux, confie-t-il pour RMC. Toute personne, on la regarde, on fait attention, même si on sait qu'il y a des fouilles corporelles à chaque entrée de station. Je ne peux pas m'empêcher d'être un peu plus vigilant sur toute la clientèle qui monte."
"On aimerait que ça recommence comme avant"
Des passagers qui ne sont pas nombreux. En pleine heure de pointe, les couloirs sont vides et les trains désertés. Il leur faudra du temps, tout comme aux conducteurs, pour reprendre confiance. Saïd confie sa "tristesse de voir aussi peu de monde dans les rames, de voir des stations entièrement vides, fermées".
"On aimerait que ça recommence comme avant, retrouver du monde, retrouver les heures de pointe où les gens vont et viennent."
"Il a pris son courage à deux mains"
Malgré le choc psychologique, le conducteur qui était aux commandes de la rame visée a repris le travail dès le lendemain, conduisant le premier métro à 4h45, pour "défier les terroristes". Christian Delhasse a aidé de nombreux blessés et a agi en héros.
"Il venait juste de quitter la station, il n'avait même pas fait 50 mètres que c'est arrivé, explique pour RMC Abdi Chuiakh, délégué syndical à la régie des transports de Bruxelles. Il y avait des hurlements, il a tout de suite compris ce qu'il se passait. Il a vu des enfants qui pleuraient, des femmes désemparées, des gens qui couraient dans tous les sens. Il ne s'est pas posé de question, il a pris son courage à deux mains. Il a commencé à aider les gens, les faire sortir, les orienter. Je suis très fier de lui, je ne sais pas comment j'aurais réagi, peut-être que j'aurais fui, peut-être que j'aurais paniqué. Mais lui, il a eu l'attitude qu'il fallait."