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Procès d'Epic Games contre Apple: pourquoi c'est l'avenir d'un modèle économique qui se joue?

"Expliquez-Nous" - C’est un procès avec un énorme enjeu qui vient de commencer en Californie. Apple est attaqué par un fabricant de jeux vidéo pour abus de position dominante

Début d’un procès de grande ampleur aux Etats-Unis. Le géant Apple est attaqué par un fabricant de jeux vidéo. Le procès qui se déroule à Oakland dans la banlieue de San Francisco. Les audiences sont retransmises en direct sur Zoom et elles vont être suivies avec passion par tous ceux qui s'intéressent au monde des nouvelles technologies. Le plaignant, c’est un éditeur de jeux vidéo, Epic Games, créateur du jeu Fornite, et l’accusé, c’est donc Apple. Les deux PDG seront présents physiquement aux audiences, assistés par deux armées d’avocats et l’on prédit qu’il va y avoir du sang sur les murs.

Apple est la plus grosse entreprise du monde, la première à avoir franchi la barre des 2000 milliards de valorisations en bourse. C’est aussi la marque la plus admirée au monde, créée par le génial Steve Job aujourd’hui disparu. Ce sont les ordinateurs, les téléphones Iphone, les Ipod, les Ipad, les montre Apple watch, les Apple télés, un cloud qui s’appelle Icloud, des podcasts qui s’appelle “podcast, Shazame, Siri”, une carte de crédit, des services. Et surtout, surtout l’App Store pour télécharger des applications.

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L'App Store est la plus grande boutique du monde. Plus d’un milliard d’utilisateurs, qui génèrent un chiffre d'affaires de plus de 500 milliards par an. C’est plus que le PIB de l'Argentine. Si App Store était un pays, ce serait le 25e du monde.

Apple prélève une commission sur une partie des transactions. Pas sur les achats en ligne, mais sur tous les abonnements. Une commission de 30%. Le PDG d’apple, Tim Cook affirme qu’il ne prélève que des miettes des fortunes qui transitent sur Apple Store, mais pour les créateurs d’applications, ce sont des miettes qui coûtent très chers.

L’été dernier, le groupe Epic Games a tenté d'éviter de payer cette redevance à Apple. Epic games, c‘est le producteur du jeu Fortnite. Si vous ne connaissez pas, je vous explique. C’est un jeu de guerre, vous jouez le plus souvent contre d’autres joueurs en ligne. Le jeu est gratuit, mais vous êtes vite tenté d’acheter une monnaie virtuelle, les V Bucks qui permettent d'améliorer votre personnage. Vous achetez des skins, des déguisements, ou des danses. Ça coûte entre 8 et 80 euros à chaque fois. Si vos enfants y jouent, vous avez intérêt à faire gaffe. Fortnite est le jeu qui rapporte le plus d’argent au monde. Autour de deux milliards par an. Et c’est sur ces énormes sommes qu’Apple prélève sa dîme.

L’été dernier, Fortnite a réussi à contourner le système en ajoutant à son jeu tout simplement une option :”paiement sans Apple”. Apple a aussitôt riposté en virant le jeu de sa plateforme Apple store. Et depuis, c’est la guerre. Le PDG d’Epic Games Tim Sweeney dénonce la tyrannie d’Apple, il parle du combat de David contre Goliath, même si lui-même n’est pas vraiment David, le pauvre petit berger désarmé face au géant Goliath. Il possède la 200e fortune du monde. Il a revendu 40% de sa boite au mastodonte Chinois Tencent. On ne va pas pleurer sur son sort.

Beaucoup d'autres procès à venir?

Mais ce qui se joue dans ce procès, c’est l’avenir du modèle économique. Apple a inventé le mot “application”, a inventé le magasin d’application, l’App Store, a créé le modèle qui permet de rémunérer les créateurs d’application des plus petit aux plus gros. Mais Apple a un quasi monopole et favorise ses propres applications qui ne paient pas les 30% de redevance.

Si la justice californienne devait condamner Apple pour abus de position dominante, ce serait la porte ouverte à beaucoup d'autres procès. Déjà, la Commission européenne a lancé une procédure la semaine dernière. Spotify, le site de musique en ligne a porté plainte pour concurrence déloyale contre Apple Musique.

La Russie vient aussi de condamner Apple à une amende, mais surtout à pré-installer des logiciels et des applications russes dans tous les Iphones vendus en Russie. Une sorte de patriotisme digital pour contrecarrer l'hégémonie de successeurs de Steve Jobs.

Nicolas Poincaré