Faut-il augmenter les impôts? La majorité s’interroge

La situation est donc plus grave que prévu… Le déficit pour 2023 pourrait s’envoler à 5,6% selon de récentes prévisions de Bercy mises au jour ce jeudi par le rapporteur général de la commission des finances du Sénat Jean-François Husson, qui s’est rendu au ministère des Finances pour exercer son droit de contrôle. Le dérapage se poursuivrait en 2024 et 2025 si rien n’est fait (5,7% puis 5,9%), d’où l’alerte donnée par le gouvernement ces derniers jours: il faut trouver des économies pour redresser les comptes. Mais faut-il aussi augmenter les impôts?
La majorité présidentielle, d’ordinaire très hostile à l’idée, s’interroge. Le sujet divise au sein même du camp macroniste. Avec cette question: le sacro-saint dogme qui prévaut depuis 2017, "zéro hausse d'impôt", est-il encore tenable? Les troupes de François Bayrou proposent depuis plusieurs mois maintenant de davantage taxer les revenus du patrimoine. Mais c’est maintenant au sein même des députés Renaissance que certains veulent lever les tabous. "Il ne faut rien s’interdire", défend l’un d’entre eux. Question de justice, il souhaite qu’un effort soit demandé aux plus aisés.
Le président du groupe Sylvain Maillard propose lui-même de reporter certaines baisses de taxes promises aux entreprises. Mais attention à ne pas créer un "choc de défiance", réagit une députée. Le risque d’un changement de stratégie, c’est de "perdre en attractivité", dit-elle, en écho à la position ferme défendue à Bercy comme à l’Elysée. L’hypothèse d’une taxation européenne pourrait être mise sur la table. Bruno Le Maire doit échanger avec les parlementaires la semaine prochaine.
"Pas le bon moment d’augmenter les impôts"
Si la piste était retenue par le gouvernement, comment seraient perçues ces hausses d'impôts par les Français? A Lyon, peu d’habitants sont emballés par cette idée, même des ménages plus aisés. Pour Mathieu, les impôts représentent une somme importante: "C’est entre 6.000 et 8.000 euros par an. C’est énorme". Selon ce chef de projet dans l’industrie, tout est une question de contexte. "Le coût de l’électricité, l’eau, les courses… Ce n’est pas le bon moment d’augmenter les impôts", souligne-t-il.
Pour les ménages plus modestes, la question ne se pose pas. Céline, assistante sociale, n’arrive déjà même pas à boucler son budget: "Au 20 du mois, je n’attends qu’une chose, c’est mon salaire". D’autres seraient prêts à faire l’effort, mais seulement si cette hausse aide vraiment les services publics d’après Mireille. "Je travaille dans une école, ça devient vraiment compliqué. Et l’hôpital a été un peu détruit…", souffle-t-elle.
Ne pas augmenter les impôts, c’était la promesse d’Emmanuel Macron. Une position difficile à tenir vu le contexte économique. Mais d’autres solutions existent. "Il pourrait y avoir des impôts même si ce ne sont pas des hausses directes. Par exemple, réduire les niches, certains avantages fiscaux ou crédits d’impôts, pour essayer de trouver des surplus budgétaires", explique Anne-Sophie Alsif, cheffe économiste du cabinet BDO France. En France, le taux de prélèvement obligatoire reste parmi les plus élevés des pays développés.