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Mention Fait maison, Nutriscore, Origin'info... La transparence alimentaire gagne-t-elle du terrain?

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Les Français ont-ils facilement connaissance de l'origine et la qualité des produits qu'ils cuisinent et consomment ? Des labels et des étiquetages mis en place ces dernières années tentent d'imposer aux restaurateurs et industriels la transparence. Problème, elle n'est pas toujours respectée, voire usurpée.

Que ce soit dans les rayons des supermarchés ou au restaurant, est-il possible de connaître rééllement la provenance des produits que l'on cuisine et que l'on mange? Avec une autre interrogation: sont-ils bons pour la santé?

Pas impossible mais pas toujours évident. Par exemple, le Nutriscore: cet étiquetage qui note de A à E les produits alimentaires fait l’objet d’une réforme au niveau européen. Sauf que sa révision, programmé pour le début de l’année 2024 et instaurée dans les pays qui l’ont adopté, n’a toujours pas vu le jour en France. Soit plus d'un an de retard. Si elle tarde, c’est en grande partie lié aux pressions des sociétés agroalimentaires, qui ne sont pas du tout satisfaites de cette nouvelle classification.

D'autant qu'un Nutriscore plus mauvais mais un produit moins cher, c’est aussi ce que les distributeurs prennent l’habitude d’afficher dans leur promotion, alertait en septembre la CLCV, association de consommateur. Celle-ci avait relevé que parmi les produits en promotion, 41% sont notés D ou E.

30 entreprises ont adopté le label "Origin'Info"

Autre label qui peine à convaincre: "Origin’Info". C'est un étiquetage mis en place pour connaitre, comme son nom l’indique, l’origine des produits. En moins d'un an, il semble toucher peu de marques. "Aujourd'hui, on a une trentaine de marques" qui l'utilisent, a a affirmé ce mercredi, sur RMC, Olivia Grégoire.

"Et certaines sont très connues, cela représente 3.000 références", a détaillé l'ancienne ministre déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation. Pour autant, au départ, "120 marques ont signé la charte", rappelle-t-elle.

Il n'est pas obligatoire et dépend donc du bon vouloir des entreprises de l'agroalimentaire, comme le Nutriscore. La raison: l'absence d'une législation européenne. "Selon le cahier des charges de l'Origin'info, la mention "UE/non UE" n'est possible qu'à partir de quatre pays d'approvisionnement différents... Ce qui renseigne tout de même le consommateur: un tel affichage indique, finalement, une traçabilité impossible", expliquait RMC Conso en décembre dernier.

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"C'est une demande très forte des consommateurs, 85% d'entre eux regardent l'information avant d'acheter", a aussi soutenu la députée Renaissance, citant également que "95% achètent quand il y a Nutriscore".

Des restaurants qui usurpent la mention "Fait maison"

Autre mention attendue mais dont les résultats peinent également à convaincre, le " Fait Maison", qui concerne cette fois les restaurateurs. Notamment parce que beaucoup l'usurpent. À titre d'exemple, l'année dernière à Lyon, plus de la moitié des établissements contrôlés (54%) qui revendiquaient cette mention étaient en infraction.

Pour Olivia Grégoire, la mention Fait maison est toutefois "trop complexe [...], il est tellement bourré d'exceptions. Il faut un peu l'assouplir, il y a des exceptions trop compliquées. Il faut commencer par simplifier un peu", prône-t-elle. "La transparence soit vous la faite, soit vous la subirez."

Des propos qui ne vont pas dans le sens d'Alain Fontaine, qui déplore dans Estelle Midi un "détricotage" de la mention "par les organisations professionnelles", et ce depuis plusieurs années. "Les restaurateurs et consommateurs sont complètement perdus", juge sur RMC le président de l'association française des maîtres-restaurateurs. "Sur 94.000 restaurants, 8.000 dont 3.200 maîtres-restaurateurs font tout maison", avance-t-il.

Les maîtres-restaurateurs, garantie d'un savoir-faire

"Les maîtres-restaurateurs ont l'obligation de proximité et de traçabilité. C'est pour cela qu'on est un peu de plus de 3.000 en France", admet le chef. "Toute la cuisine est faite majoritairement, à 80%, de produits frais et bruts. C'est un titre d'État renouvelable tous les quatre ans."

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"Il a été créé en 2007 justement pour arrêter la malbouffe", développe Alain Fontaine. Celui-ci évoque un "pari qui n'est pas gagné". "L'Etat s'est rendu compte qu'il y avait problème de traçabilité. Cela répond à une volonté de transparence. Il y a eu des progrès ces dix dernières années mais aujourd'hui, si on regarde bien, on en sait pas ce qu'on mange", déplore-t-il.

"C'est un problème de santé publique et de souveraineté alimentaire" car les normes françaises ne sont pas les mêmes à l'étranger. Il y a obligation d'indiquer l'origine des viandes depuis 1 semaine."

Les jeunes ne cuisinent plus avec des produits frais

À noter par ailleurs que la moitié des dépenses totales pour des produits frais traditionnels, catégorie rassemblant la poissonnerie, la boucherie, les fromages à la coupe et les fruits et légumes, sont réalisées par des consommateurs de plus de 60 ans, a indiqué Kantar mardi, en marge du Salon de l'agriculture, cité par l'AFP.

"50% du business produits frais traditionnels repose à date sur les clients de plus de 60 ans", observe la société d'études de marché dans un communiqué, dessinant un important contraste générationnel au sujet de la consommation de ces produits issus de la production agricole.

D'un côté, les seniors sont d'importants consommateurs de ces aliments "qu'ils connaissent depuis l'enfance", explique Kantar. Ils savent préparer et cuisiner les carottes, viandes ou fromage et ont aussi "plus de temps et un pouvoir d'achat plus élevé" pour les acheter. A contrario, "les plus jeunes n'ont pas les codes, pas le savoir-faire culinaire, pas le temps, ni l'argent" pour préparer et donc consommer ces produits, explique Kantar.

Paul Lahcene et Léo Manson