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Auto-école Emmaüs pour bénéficiaires du RSA: "la mobilité est indispensable pour l'accès à l'emploi"

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- - Emmaüs France

Sans permis, il est beaucoup plus difficile de décrocher un emploi. Partant de ce constat, Emmaüs expérimente en Charente une auto-école solidaire. Les premiers élèves de cette auto-école vont passer les épreuves du code à la fin du mois. Une initiative qui fait partie d'un vaste plan pour favoriser la mobilité des demandeurs d'emplois, comme l'explique pour RMC.fr son directeur, Yves Gillet.

Yves Gillet, directeur pédagogique de l'auto-école solidaire d'Emmaüs, à Ruffec, en Charente. Décidée en avril 2015, cette auto-école a été mise en place en septembre 2016 et accueille aujourd'hui 30 élèves. Dès la fin du mois, certains d'entre eux passeront l'épreuve du code. Le coût de la formation est de 300 euros, contre 1.200 euros en moyenne dans des auto-écoles "classiques". Les élèves ont été choisis sur des critères sociaux.

"C'est la première auto-école sociale d'Emmaüs en France. Ce n'est pas le cœur de métier d'Emmaüs, mais l'association y voit un moyen de subvenir aux besoins des plus démunis. Si ce prototype fonctionne, il est envisagé de développer l'initiative sur tout le territoire. La mobilité aujourd'hui et encore plus demain, c'est indispensable pour accéder à l'emploi et à la vie sociale, à un épanouissement personnel, tout simplement. La mobilité géographique va souvent de pair avec la mobilité professionnelle. De plus, nous sommes en milieu rural et sans permis de conduire c'est très compliqué de se déplacer et de décrocher un emploi.

"120h de formation au code, et 45h de formation à la conduite"

Nos élèves sont choisis à partir de plusieurs critères. D'abord, géographiques. Puis, ce doit être quelqu'un qui n'est pas en mesure de financer son permis et/ou qui a des difficultés d'apprentissage. Les personnes qui viennent à l'auto-école sont pour la plupart bénéficiaires du RSA, demandeurs d'emplois ou rencontrent des problèmes d'apprentissage. C'est une commission d'admission qui statue.

Les formations que nous dispensons sont différentes de celle des auto-écoles traditionnelles puisque nous accueillons des personnes qui ont des difficultés d'insertion sociale, professionnelle, voire des difficultés d'apprentissage. Nous commençons par des formations collectives, puis nous faisons des formations individuelles, que nous associons à des périodes d'auto-formations où les élèves travaillent de chez eux avec des logiciels fournis par notre prestataire. On est sur des modalités pédagogiques spécifiques, c'est pourquoi nous attendons 120 heures de formation pour présenter nos candidats à l'épreuve du code. Quant à la conduite, nous nous basons sur une formation de 45 heures, contre 33 heurs pour la moyenne nationale.

"Aller au-delà du simple accès au permis"

Mais avoir le permis c'est une chose, pouvoir se déplacer en est une autre. Vous allez former des gens au permis, mais quid de leurs véhicules? C'est pourquoi nous avons développé un partenariat avec des fournisseurs de véhicules low-costs, via la plateforme régionale d'accès à la mobilité, pour proposer, suite à l'obtention du permis, un accès aux véhicules les moins chers. Avec le département de la Charente, on met en place une plateforme de mobilité départementale pour proposer du covoiturage, du copartage, ou d'autres moyens pour aller au-delà du simple accès au permis.

C'est pensé du début jusqu'à la fin, ce n'est pas juste: 'on donne le permis et débrouillez-vous'. Tous les acteurs, publics et privés, sont mobilisés sur cet aspect mobilité, car il y a urgence aujourd'hui à traiter le problème. Dans les années 2000, on avait des moyens d'action différents. Les politiques publiques avaient plus de moyens, on accédait au financement du permis plus facilement à travers des emplois aidés. Mais aujourd'hui les politiques publiques, contraintes par des raisons économiques, doivent envisager les choses autrement. C'est ce qui a fait que le département de la Charente a mis en place cette plateforme de mobilité et nous a associés à cette problématique. Dans un souci d'efficacité tout est beaucoup plus cohérent, on s'associe tous les uns aux autres pour déployer le moins possibles d'actions et être le plus efficace possible".

Propos recueillis par Philippe Gril