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"Manifester, c'est démodé": l’avis tranché d’Arthur Chevallier

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La manifestation de la CGT, c’est ce 1er octobre. Au programme: hausse des salaires, abrogation de la réforme des retraites, le service public, etc. Mais pour l’écrivain et éditeur Arthur Chevallier, les manifestations n’ont plus le même impact qu’avant. C’est son avis tranché ce mardi sur RMC.

Manifester, c’est devenu démodé. D’ailleurs, tout indique que la mobilisation de ce mardi 1er octobre ne sera pas un succès. Cette sorte de grève préventive n’a pas l’air d’emporter les foules. C’est un coup dur de plus pour des syndicats qui n’arrivent plus depuis un bon moment à faire gagner la rue. Alors forcément, la mobilisation baisse. Quand une équipe perd de plus en plus de matchs, les supporters sont de moins en moins nombreux dans les gradins.

Les mobilisations pour la réforme des retraites étaient certes un succès de communication, mais pas de résultat. La France a beau s’être mobilisée pendant des semaines et avoir battu des records de mobilisation, les résultats n’ont pas été au rendez-vous. Un mouvement soutenu par 80% des Français. La réforme a quand même été votée, ce n'était clairement pas le but.

Alors, on peut voir ça comme une belle performance, mais une belle performance, ça n’est pas une victoire. Même si les leaders syndicaux se sont montrés courageux, ils ont aussi été humiliés par un pouvoir qui ne les a jamais pris en compte. Depuis, plus grand-chose.

La matinale 100% info et auditeurs. Tous les matins, Apolline de Malherbe décrypte l'actualité du jour dans la bonne humeur, avec un journal toutes les demies-heures, Charles Magnien, le relais des auditeurs, Emmanuel Lechypre pour l'économie, et Matthieu Belliard pour ses explications quotidennes. L'humoriste Arnaud Demanche vient compléter la bande avec deux rendez-vous à 7h20 et 8h20.
L'avis tranché d'Arthur Chevallier : Manifestations, "Plus le même impact qu'avant" - 01/10
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Le gouvernement ne joue plus le jeu

Alors oui, le gouvernement n’a pas voulu jouer le jeu, mais leur métier, c’est le rapport de force. Il est assez rare de voir un gouvernement qui invite spontanément les syndicats à sa table. Il y a quelques années, les manifestations avaient de meilleurs résultats avec des mobilisations plus faibles.

Exemple avec le CPE, le contrat première embauche, en 2006. Il aura fallu quelques centaines de milliers d’étudiants, une centaine de lycées bloqués, un braséro sur le périphérique et des poubelles devant le Medef pour que Jacques Chirac retire la loi. En termes d’efficacité, c’était quand même autre chose. Le but d’une manifestation, ce n'est pas de découvrir Paris, c’est de changer la vie.

La France, un pays de manifestants

C’est inquiétant pour la France. Nous sommes un pays où les manifestants ont le pouvoir de renverser des régimes politiques. Entre 1789 et 1870, donc moins de 100 ans, des manifestations un peu musclées ont réussi à renverser trois rois, Louis XVI, Charles X et Louis-Philippe, et un empereur, Napoléon III. Et à imposer deux Républiques, en 1848 et en 1870. Voilà une salle des trophées bien remplie.

Alors ça se calme un peu au XXe, mais ça reste honorable. En 1936, les grèves du Front populaire ont mis le pays à l’arrêt et ça a donné la semaine de 40 heures, les congés payés et les conventions collectives. Trente ans après, c’est Mai 68. Encore une victoire: le Smic augmente de 35%.

Pourquoi les Français ne manifestent plus?

Mais alors, pourquoi les gens ne sont pas dans la rue? Tout simplement parce que c’est fatiguant, et que ça ne fonctionne plus. Les syndicats ont perdu leur pouvoir d’influence. Ça n’est pas que de leur faute, mais ils ont une part de responsabilité. La gauche aussi, qui ne sait plus parler aux travailleurs.

Les ouvriers ne votent plus, ou quand ils votent, c’est la plupart du temps pour le RN. Le monde de la rue a perdu le contact avec le monde du travail. Ça n’a rien d’une bonne nouvelle, car les manifs, les syndicats, les grèves, ce n'est pas seulement de la politique, c’est aussi une tradition française. Je dirai même plus: les manifestants sont des personnages indispensables du grand spectacle de la République.

Arthur Chevallier