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Pourquoi, à quelques jours de la fin de son mandat, Donald Trump vide-t-il le "Couloir de la mort"?

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EXPLIQUEZ-NOUS - La première exécution fédérale d'une femme a eu lieu mercredi matin aux Etats-Unis: ce n'était pas arrivé depuis 1953, l'année où deux femmes avaient été exécutées.

La première exécution fédérale d’une femme a eu lieu mercredi matin aux Etats-Unis. Cela n’était pas arrivé depuis près de 70 ans. En 1953, deux femmes avaient été exécutées. Ethel Rozenberg était passée sur la chaise électrique avec son mari, pour espionnage au profit de l’URSS. Et juste après une femme et son compagnon avaient été exécutés dans une chambre à gaz pour le rapt et le meurtre d’un enfant de six ans. Depuis aucune femme n’avait fait l’objet d’une exécution fédérale. Jusqu’à mercredi matin. 

Qu’est-ce qu’une exécution fédérale? C’est l'exécution d’une personne condamnée pour un crime fédéral. C’est-à-dire un crime particulièrement grave comme par exemple les rapts d’enfants. Cela a été décidé en 1932 après un enlèvement qui avait traumatisé l'Amérique, celui du fils de l’aviateur Charles Lindbergh.

Dans ces cas-là, le criminel est jugé par un tribunal fédéral et la décision de d'exécution ou de la grâce revient non pas au gouverneur de l’Etat, mais directement au président des Etats-Unis. 

Et depuis 45 ans, les présidents américains n’ont laissé exécuter pratiquement personne. En effet, aucune exécution sous les présidences de Carter, Reagan, Bush père, Clinton, Obama. Seul Georges Bush fils a ordonné trois exécutions en 2001 et 2003. Dont celle du terroriste responsable du monstrueux attentat d'Oklahoma City.

Puis un moratoire a été décidé et depuis 2003? il n’y a eu aucune exécution fédérale. Jusqu'à cet été. Finalement, Donald Trump est revenu sur ce moratoire. L'administration républicaine a en effet renoué en juillet avec une pratique suspendue depuis 17 ans, alors qu'au même moment les Etats reportaient toutes les exécutions pour éviter de propager le virus.

Et Trump d'indiqué qu’il ne s’opposerait pas à l'exécution des treize condamnés qui se trouvaient dans le couloir de la mort fédérale.

Depuis juillet dernier, 10 hommes ont donc été exécutés et une femme mercredi matin. Et les deux derniers devraient être mis à mort ce jeudi et vendredi. Donald Trump aura donc vidé le couloir de la mort en terminant moins d’une semaine avant la fin de son mandat.

Qu’avait fait cette femme qui a été exécutée mercredi? 

Elle avait commis il y a 16 ans un crime épouvantable. Elle avait fait croire à son mari qu’elle attendait un enfant. Elle avait ensuite sympathisé avec une jeune femme de 23 ans, enceinte de huit mois. Elle avait finalement tué cette amie, l’avait éventrée et était rentrée chez elle avec le bébé vivant. La police l’avait rapidement arrêtée, l’enfant avait été remis au père et Lisa Montgomery, c’est son nom, a été condamnée à mort à l'unanimité du jury. 

Ses avocats jusqu’au dernier moment ont tenté d’obtenir un sursis. Cela a été une course contre la montre. Une première exécution en décembre a été reportée parce qu’un avocat souffrait du Covid. Puis la défense a fait valoir que son état mental ne lui permettait pas de comprendre la sentence. 

En clair qu’elle était folle. Un premier juge a accordé un sursis, mais le ministère de la Justice a fait appel et finalement en pleine nuit, mardi soir, la Cour Suprême s’est prononcé. Les six juges conservateurs ont rejeté la grâce et cette femme de 52 ans a été exécutée trois heures plus tard par injection dans une prison de l’Indiana. 

À quelques jours près, elle aurait eu la vie sauve. En effet, Joe Biden sera officiellement intronisé président mercredi prochain et il a fait savoir qu’il n’y aurait pas d'exécution fédérale sous sa présidence. Il est contre la peine de mort. Il ne peut s’opposer à son application par les États qui la pratique. Mais il veut encourager ces Etats à ne plus recourir à la peine de mort.

Les Etats-Unis ont déjà connu l’abolition. En 1967, la cour suprême avait jugé que cette peine était cruelle et avait suspendu les exécutions. Mais dix ans plus tard, en 1977, la peine de mort a été rétablie. Depuis, 1530 personnes ont été exécutées. 1523 hommes et 17 femmes. Et deux exécutions fédérales sont encore prévues pour les tout derniers jours de Donald Trump. Une ce jeudi, l’autre vendredi.

Nicolas Poincaré