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Royaume-Uni: une nouvelle loi anti-immigration historiquement dure dévoilée ce mardi

Le Royaume-Uni va dévoiler ce mardi une nouvelle législation pour lutter contre l’immigration clandestine. Les immigrés qui arrivent de France en traversant la Manche ne pourraient plus demander l’asile.

Le Premier ministre anglais, Rishi Sunak, l'a annoncé dimanche: tous ceux qui arrivent en Angleterre sur des petits bateaux après avoir traversé la Manche ne seront plus éligibles au droit d’asile. Tout simplement parce qu’ils auront commis un acte illégal en débarquant au Royaume-Uni, sans visa ni autorisation. Ne vous y trompez pas, a dit Rishi Sunak en s’adressant aux candidats à l’asile, si vous venez ici illégalement, vous ne pourrez pas rester.

La loi qui sera présentée mardi va restreindre les possiblités de recours avant une expulsion et elle va surtout imposer au ministre de l'Intérieur l’obligation d’expulser toutes les personnes arrivant sur les petits bateaux. Et de les expulser le plus rapidement possible.

La ministre de l'Intérieur ne devrait pas avoir besoin de se le faire dire deux fois: Suella Braverman a fait de la lutte contre l’immigration clandestine la priorité de son action. On la dit obsédée par la question migratoire. Même si elle même est la fille d'immigrés indiens, comme la précédente ministre de l'Intérieur Priti Patel, qui avait instauré une nouvelle loi sur la migration très dure, et comme le Premier ministre Rishi Sunak, qui veut aujourd'hui les durcir encore. En Angleterre, ce sont donc trois hauts responsables politiques eux-mêmes issus de l’immigration qui ont pris la tête de la lutte contre l’immigration.

Une obligation d’expulsion, mais vers où?

C’est toute la question. Les conventions internationales imposent d'expulser les immigrés clandestins vers un pays tiers "sûr". C'est-à-dire un pays qui n’est pas en guerre et qui n’est pas une dictature. Ce qui interdit les expulsions vers l'Afghanistan, la Syrie, l'Irak, l'Iran…

Pour résoudre le problème, le gouvernement actuel ressort donc le projet un peu fou de Boris Johnson d'envoyer les indésirables au Rwanda. Un accord a été signé entre le Royaume-Uni et ce tout petit pays d'Afrique centrale. En échange d’une grosse enveloppe financiere, le Rwanda accepterait sur son sol tous ceux que l'Angleterre enverrait par vol charter. Un premier hôtel avait été réquisitionné et aménagé à Kigali. Il devait accueillir les premiers expulsés. Les Anglais payaient les frais, et les Rwandais accordaient des visas de cinq ans et même la possibilité de s'installer définitivement dans le pays. Sauf que pour l’instant, aucun charter vers le Rwanda n’a décollé.

La loi devait entrer en vigueur au printemps dernier. Le premier vol était programmé, les premiers immigrés étaient même déjà à l’aéroport lorsqu’une décision de justice a fait capoter l’opération. Toutes les organisations de défense des droits de l’homme se sont mobilisées contre ce projet. Le prince Charles, qui n'était pas encore roi, était même exceptionnellement sorti de sa réserve. Il avait laissé dire qu’il trouvait l’idée “effroyable”.

Mais finalement, de recours en recours, la justice a fini par se prononcer définitivement en décembre dernier. Elle a validé la possibilité d’envoyer les clandestins au cœur de l'Afrique. Malgré cette décision il y a trois mois, aucun avion n’a encore décollé mais c’est bien ce que promettent Rishi Sunak et sa ministre de l’Intérieur. De faire aboutir ce projet.

Jamais les gouvernements successifs ne sont parvenus à enrayer les tentatives de traverser la Manche

Les autorités anglaises voudraient surtout empêcher les clandestins de tenter de rejoindre leur pays. C’est la promesse de tous les gouvernements depuis des années, mais sans succès jusqu'à présent. Au contraire. L’an dernier, 45.000 immigrés ont traversé la Manche sur des bateaux de fortune. C’est le record absolu. Les Anglais veulent renforcer leur coopération avec deux pays, l’Albanie et la France.

L’Albanie, parce que c’est le premier pays d’origine des clandestins. Près d’un tiers de ceux qui traversent la Manche. Et c’est aussi la nationalité de la majorité des passeurs. Londres voudrait augmenter le nombre des expulsions.

Et puis la France parce que c’est le pays d'où partent les bateaux. Les Anglais financent toujours plus les forces de l’ordre françaises pour empêcher les départs. Par exemple, en offrant des drones. Mais les résultats ne sont pas jugés satisfaisants par les Anglais.

Vendredi, un sommet franco-britannique est prévu à Paris. C’est le premier depuis cinq ans. L’objectif, c’est d'avancer sur l’immigration et de mettre fin à des années de querelles entre Londres et Paris sur ce dossier.

Nicolas Poincaré (édité par J.A.)