L’ancien DG d’Orpea a vendu des actions avant les révélations: "C’est un grand classique et c’est grave"
Vendre 5.456 actions, pour la somme de 588.157 euros, trois semaines après avoir appris la préparation du livre "Les Fossoyeurs" sur les pratiques dans les maisons de retraite d’Orpea. Selon Le Canard Enchainé, c’est ce qu’a fait Yves Le Masne, l’ancien directeur général du groupe, qui a été renvoyé après les révélations du journaliste Victor Castanet. Les registres de l'Autorité des marchés financiers, consultables en ligne, confirment cette vente d’actions.
"C’est une question qui touche Yves Le Masne, mais qui ne touche pas la société, a assuré le néo-PDG d’Orpea Philippe Charrier. Nous avons bien sûr été informés de ça. Les autorités examineront ce cas avec l’intéressé. Il a peut-être des bonnes raisons, que je ne connais pas, mais je ne vais certainement pas le juger à la place des autorités."
Pour le prof d’économie Thomas Porcher, présent dans "Les Grandes Gueules" ce mercredi sur RMC et RMC Story, "c’est choquant que la fin de vie soit soumise à des actions". "Les PDG regardent plus le cours de l’action que leur propre entreprise. Lui, il s’est dit que les actions allaient chuter quand le livre sortirait. C’est un grand classique et c’est grave", regrette-t-il.
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"Si c’est vrai, c’est lâche"
Pour l’avocate Marie-Anne Soubré, "ça ressemble" à un délit d’initiés. "Le délit d’initiés, juridiquement, c’est se servir d’une information qu’on est l’un des seuls à avoir pour pouvoir spéculer à la hausse ou à la baisse sur des actions, explique-t-elle. C’est passible de cinq ans d’emprisonnement et 100 millions d’euros d’amende, mais c’est calculé par rapport aux bénéfices qu’on a fait. Après, il y a des tas de raisons pour lesquelles on peut vendre ses actions. Déjà, il est présumé innocent. Peut-être qu’il aura une bonne raison, un besoin d’argent, etc., mais ça parait un peu louche."
"Si c’est vrai, qu’il a fait un délit d’initiés en sachant que l’enquête allait sortir et que ça allait faire un gros boom, c’est lâche de sa part, tout simplement, estime le chef d’entreprise Mehdi Ghezzar. Ce que je trouve désolant dans l’affaire, hormis bien sûr la détresse des patients, c’est que le PDG essaye de défendre encore l’ancien directeur général. Il essaye d’insinuer que ce n’était pas préparé."
Après le scandale provoqué par les révélations du livre "Les Fossoyeurs", les autorités ont annoncé une "vaste opération de contrôle" d'Orpea, avec l'ouverture d'une "double enquête" administrative confiée aux inspections générales des affaires sociales (Igas) et des finances (IGF). Et les établissements du groupe feront l'objet de "contrôles inopinés" diligentés par les services de l'État.
Le président de la République Emmanuel Macron "a dit que ces révélations étaient absolument choquantes, bouleversantes et qu'elles appelaient évidemment à ce que nous poursuivions notre investissement pour le grand âge", a déclaré ce mercredi le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal à l'issue du Conseil des ministres.