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Le Hellfest, c'est comme un pèlerinage, il faut l'avoir fait au moins une fois

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La 12e édition du Hellfest, festival de metal et musiques extrêmes, a débuté ce vendredi, à Clisson. Plus de 150.000 fans sont attendus jusqu'à dimanche pour voir pas moins de 160 groupes. L'événement est devenu incontournable pour les membres de la "communauté" metal, pour lequel il constitue un véritable pèlerinage, comme l'explique pour RMC.fr le sociologue Corentin Charbonnier sociologue, auteur d'une thèse sur le festival.

Corentin Charbonnier est sociologue, auteur de Hellfest: un pèlerinage pour metalheads (éd. Ulule). Le livre est issu de sa thèse d'anthropologie soutenue en décembre 2015: La communauté metal: le Hellfest comme un lieu de pèlerinage.

"Pour les fans de metal, les 'metalheads', le Hellfest est un pèlerinage, au sens propre du terme. Il y a le langage qu'on utilise entre festivaliers, ou avec les organisateurs et les artistes. On a également des lieux qui sont très fortement ritualisés, comme la 'War zone'. D'autres qui sont même empreints de religieux: il y a l'entrée principale, qui est une cathédrale géante, ou la statue en hommage à Lemmy (bassiste - chanteur de Motorhead, décédé en décembre 2015 à l'âge de 70 ans et présent sur scène presque jusqu'au dernier jour, ndlr).

"Une vie qui tourne autour du festival"

Le Hellfest est devenu le point de rendez-vous central dans la vie du metalleux en France. Il a une façon d'organiser sa vie qui tourne autour du festival, qu'il prépare un an à l'avance. On y va en couple, et parfois avec ses enfants à partir de 12 ou 13 ans. C'est un lieu convivial, d'échange et de communication où les gens se retrouvent chaque année. Il faut l'avoir fait au moins une fois dans sa vie pour prouver qu'on est vraiment un métalleux.

Le Hellfest gagne en puissance d'années en années. Avant même d’annoncer sa programmation, il est déjà complet. Les gens disent très clairement: 'peu importe les groupes, on vient parce qu'on sait que l'ambiance y sera et qu'on y retrouvera des amis'. C'est le passage obligé annuel pour le metalhead qui a envie de faire partie à fond de cette communauté, de découvrir et de voir des groupes pour lesquels il n'aurait pas forcément payé pour les voir ailleurs.

"C'est un espace communautaire"

'Quand on entre au Hellfest, on est dans une autre vie, un autre monde', explique Ben Barbaud, son créateur. C'est tout à fait ça, c'est un espace en dehors du temps. Les gens organisent tellement leur vie toute l'année en fonction de ce festival qu'une fois qu'ils y sont, c'est comme s'ils étaient dans une bulle. D'ailleurs on ne sort plus du site puisque tout est prévu sur place. Il y a des lieux pour se nourrir, pour se vêtir, des douches, des recharges de portables… C'est une petite ville qui s'est créée au fil des années et qui est devenu un espace communautaire.

Les festivaliers sont avec leurs copains - ou avec des gens qu'ils ne connaissent pas mais qui vont devenir des connaissances -, pour vivre un truc à part. C'est d'autant plus fort qu'on vit cela entre soi, entre metalheads. On en profite avant de retourner dans la vie civile, puisque lundi ou mardi, les festivaliers vont retourner à leur travail.

"Il n'y a pas d'équivalent pour les autres styles de musique"

On en est arrivé à un tel point que dorénavant, on peut se faire tatouer le logo du Hellfest sur le corps. A longueur de journée, les tatoueurs présents sur le festival tatouent le logo sur des festivaliers. Je n'ai jamais vu quelque chose de ce genre pour un autre festival. C'est aussi le premier festival à avoir créé un fan-club: le Hellfest Kult. Des fan-clubs de groupes, il y en a pleins, mais de festivals… c'est inédit.

Il n'y a pas d'équivalent pour les autres styles de musique. Je n'ai pas retrouvé ça dans d'autres communautés. La communauté electro, par exemple, peut aller dans des grands festivals internationaux à l'étranger, mais l'esprit n'est pas le même. L'organisation n'est pas la même et la vie d'un fan d'électro n'est pas rythmée par rapport aux festivals. Et une fois qu'ils sont sur le site, le sentiment communautaire n'est pas le même."

Propos recueillis par Philippe Gril