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Abaaoud affirme être entré "sans documents officiels" en France, le pourrait-il encore aujourd'hui?

Abaaoud serait rentré en France, via la Grèce, sans documents officiels

Abaaoud serait rentré en France, via la Grèce, sans documents officiels - DABIQ / AFP

REPORTAGE - Selon le témoignage de Sonia que vous avez pu entendre ce jeudi sur RMC, Abdelhamid Abaaoud, le cerveau présumé des attentats de Paris, mort dans l'assaut de Saint-Denis, serait rentré en France, via la Grèce, sans documents officiels, avec un groupe de 90 personnes. Mais, qu'en est-il aujourd'hui? Aurait-il pu venir en France aussi facilement? Eléments de réponse.

"La France c’est zéro… On est rentrés sans documents officiels. On est venus à plusieurs. Il y a des Syriens, des Irakiens, des Français, des Allemands, des Anglais. On est rentrés à 90, on est un peu partout en Ile-de-France." Ces mots, selon le témoignage livré par Sonia ce jeudi sur RMC, ont été tenus par Abdelhamid Abaaoud, cerveau présumé des attentats du 13 novembre à Paris, pour expliquer comment il serait rentré en France. Selon ses dires, le terroriste aurait emprunté la route des migrants, via la Grèce, pour se rendre en France. Et cela sans jamais avoir été inquiété. Mais qu'en est-il aujourd'hui? Est-il toujours aussi simple de rentrer sur le territoire?

"Et là ils m’ont cru..."

Depuis fin octobre, les contrôles des nouveaux arrivants sont renforcés comme a pu le constater RMC sur l’île de Lesbos, en Grèce. Tous les migrants passent obligatoirement par le centre d’identification de Moria, à quelques kilomètres du port. Empreintes digitales, photo, interrogatoire... autant de procédures subies par Hewad, 25 ans, qui a fui l’Afghanistan.

"Ils m’ont demandé si j’avais des papiers d’identité. Mais je n’en ai pas. Alors ils ne m’ont pas cru quand j’ai dit que j’étais Afghan", témoigne-t-il sur RMC avant d'ajouter: "Ils m’ont montré une photo du président et je l’ai reconnu. Ils m’ont aussi demandé d’identifier sur des photos des chanteurs connus chez moi et j’ai répondu juste. Et là ils m’ont cru..." Mais, à l'entendre, malgré les contrôles, certains migrants arrivent à frauder.

Des fraudes encore constatées

"Un Iranien et un Pakistanais ont réussi à avoir des papiers de réfugiés afghans, assure Hewad. Quelqu’un leur a expliqué ce qu’il fallait dire, les réponses aux questions. Et ils ont eu leurs papiers". Nationalité, empreintes digitales et photo sont enregistrées par la police grecque et l’agence européenne de contrôle aux frontières, Frontex. Elles sont ensuite transmises à EURODAC, une base de données européenne des migrants clandestins.

"Les contrôles que l’on fait servent à déterminer le parcours des personnes qui migrent, explique Tomasz Franczyk, coordinateur pour Frontex à Lesbos. Si un réfugié rejoint par exemple l’Angleterre ou la France et fait une demande d’asile là-bas, on pourra facilement déterminer où il a été enregistré sur le sol européen, sur quelle île et quel jour".

"Un sujet très sensible"

La police de chaque Etat membre peut ensuite croiser ces données avec les siennes, dans le cadre d’enquêtes criminelles ou terroristes. Frontex, en revanche, n’a pas accès aux données des services de police et de renseignement de chaque Etat. Impossible donc de savoir, au moment de l’enregistrement, si un migrant fait l’objet d’une fiche S en France par exemple.

"Les bases de données sont protégées. Nous ne sommes pas autorisés à vérifier des informations dans les fichiers de police ou de renseignements des Etats. C’est un sujet très sensible", précise Tomasz Franczyk. Un nouveau cadre juridique et des pouvoirs élargis en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme: c’est ce qu’a réclamé le parton de Frontex aux lendemains des attentats de Paris. En vain, pour le moment…

M.R avec Amélie Rosique