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Affaire Adèle Haenel: le parquet de Paris requiert un procès contre Christophe Ruggia pour agressions sexuelles

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INFO RMC - Le parquet de Paris a requis le renvoi devant le tribunal correctionnel de Christophe Ruggia pour agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité sur Adèle Haenel. Dans son réquisitoire définitif rendu mercredi 6 février 2024 que RMC a pu consulter, le parquet de Paris retient donc deux circonstances aggravantes à l’encontre de Christophe Ruggia pour "plusieurs épisodes d’attouchement de nature sexuelle" datant de courant 2001 alors qu’Adèle Haenel avait 12 ans jusqu’au 10 février 2004.

C’est l’une des figures du #MeToo cinéma. Le 3 novembre 2019, Adèle Haenel avait accusé le réalisateur Christophe Ruggia d’agressions sexuelles de ses 12 à 14 ans dans Mediapart. L’actrice qui incarnait le rôle principal du film de Christophe Ruggia Les Diables en 2001 avait ensuite déposé plainte courant novembre 2019. Quatre ans plus tard, le parquet de Paris demande le renvoi de Christophe Ruggia devant le tribunal correctionnel pour agression sexuelle sur mineur par personne ayant autorité.

Dans son réquisitoire définitif que RMC a pu consulter, le parquet de Paris s’est notamment appuyé sur les "déclarations circonstanciées constantes et précises et datées d’Adèle Haenel" pour établir que "Christophe Ruggia lui a imposé des agressions sexuelles nonobstant ses dénégations". Adèle Haenel dénonce "plusieurs épisodes d’attouchement de nature sexuelle sur son sexe et sa poitrine tout en fournissant des détails sur le déroulement des faits, leur caractère systématique lors de ses visites au domicile de Christophe Ruggia, la configuration des lieux, leurs positions respectives et le mode opératoire".

Constante dans la dénonciation des faits au fil des années

Le parquet de Paris note que les "faits ne cesseront qu’à l’initiative d’Adèle Haenel alors que celle-ci vient de débuter une relation avec un garçon de son âge" ; que Adèle Haenel a été constante dans la dénonciation des faits au fil des années auprès de cinq "confidents" dont la réalisatrice Céline Sciamma, et la sœur du réalisateur Christophe Ruggia.

Pour établir "l’absence de consentement" d’Adèle Haenel et l’élément constitutif de la "contrainte", le parquet de Paris s’appuie sur son âge. Adèle Haenel était âgée de 12 à 14 ans mais également sur "l’importante différence d’âge entre les deux protagonistes, l’absence totale de connaissance de la sexualité pour Adèle et l’autorité de Christophe Ruggia sur Adèle Haenel liée à leur différence de statut professionnel", "la description de son état de sidération ainsi que de son attitude physique de refus lors de la commission des faits" et enfin "la survenance d’une contrainte psychologique progressive liée à l’intensité des conditions difficiles de tournage, l’isolement du reste de l’équipe du film la mention d’une dette envers celui qui a initié sa carrière au cinéma et enfin l’isolement du reste de sa famille et de ses amis".

Dès la première visite au domicile du réalisateur

Adèle Haenel dénonce des agressions sexuelles dès la première visite au domicile du réalisateur chez qui elle s’est rendue tous les samedis après-midi pendant près de trois ans après le tournage du film Les diables, de ses 12 à 14 ans, de septembre 2001 à février 2004. "Mon sentiment à l’époque c’est que j’avais le sentiment de sauver ma peau en sortant de cet appartement". La comédienne, décrit toujours la même scène au domicile de Christophe Ruggia: "Il prenait un prétexte quelconque pour venir à côté de moi sur le canapé. Là, il commençait à me caresser les cuisses en remontant vers mon sexe, comme ça, l’air de rien. Il touchait alors aussi mon sexe, il m’embrassait dans le cou en respirant très fort, il passait sa main dans le col de mon tee-shirt et il touchait ma poitrine". Elle explique qu’elle se sentait "absolument redevable" du réalisateur qui l’avait fait tourner pour la première fois. "Il me disait qu’il m’avait créée, que je n’étais formidable que grâce à lui (...) Il m’a rendue dépendante". Lors de sa première audition le 26 novembre les enquêteurs notaient les spasmes qu’Adèle Haenel avait manifestés à l’évocation des agressions. Face à la juge d’instruction le 7 décembre 2020 elle déclarait "quand j’étais sous l’emprise de Christophe Ruggia je le ressentais par du mal-être".

Elle dénonçait également deux épisodes lors des festivals de Marrakech et Yokohama à l’hôtel elle se souvenait des déclarations d’amour de Christophe Ruggia qui voulait l’embrasser "il me reprochait l’amour qu’il avait pour moi". Depuis 4 ans, le réalisateur nie avoir agressé sexuellement la toute jeune comédienne il a évoqué lors de ses interrogatoires un "côté fusionnel" ne jugeait pas les visites régulières d’Adèle Haenel à son domicile anormales puisqu’ils appartenaient dit-il "l’un à l’autre" et niait toute emprise, y compris lorsqu’il a été confronté à Adèle Haenel le 29 juin 2023.

RMC a contacté les avocats d’Adèle Haenel ainsi que les conseils de Christophe Ruggia qui n’ont pas souhaité commenter ces réquisitions.

Marion Dubreuil (édité par J.A.)