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Meurtre de Philippine: pourquoi le suspect, déjà condamné pour viol et sous OQTF, était en liberté

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Trois jours après la découverte du corps de Philippine (19 ans) dans le bois de Boulogne, à Paris, un suspect a été arrêté en Suisse. Déjà condamné pour viol en 2019, il était sorti de prison et son OQTF n’a pas été exécutée. Remis en liberté, il n’a pas respecté son obligation de pointage et son assignation à résidence.

Un homme suspecté d'avoir tué Philippine, cette étudiante de 19 ans dont le corps a été découvert samedi dans le bois de Boulogne à Paris, a été interpellé ce mardi soir en Suisse. Agé de 22 ans et de nationalité marocaine, il était connu de la justice et faisait l’objet d’une obligation de quitter le territoire selon le parquet de Paris. Une demande d'extradition va maintenant être adressée aux autorités suisses.

Le suspect a été arrêté loin du bois de Boulogne. C’est à Genève que ce jeune Marocain de 22 ans a été interpellé, par la police suisse. Les autorités françaises avaient émis un signalement pour retrouver celui qui est soupçonné d’avoir tué Philippine. Quelques heures auparavant, son ADN, relevé sur les lieux du crime, avait matché avec le fichier des délinquants sexuels. Les enquêteurs se sont alors penchés sur le profil du suspect. Arrivé en 2017 en France, il était encore mineur lorsqu’il a violé une étudiante et il a été condamné en 2019 à 7 ans de prison.

Les enquêteurs ont retrouvé la trace du suspect à partir de la carte bancaire de l’étudiante. Cette carte a été utilisée pour effectuer un retrait d’argent à un distributeur de Montreuil, en Seine-Saint-Denis, vendredi soir, au moment où les proches de Philippine s’inquiétaient de sa disparition. A partir de ce retrait d’argent, un long travail de recoupement de vidéosurveillance, de téléphonie et de fichiers a permis d’identifier ce suspect, puis de le localiser alors qu’il avait pris la fuite ces dernières heures… jusqu’à Genève.

Un problème administratif puis une remise en liberté

Cet homme de 22 ans était sous obligation de quitter le territoire français. Une décision qui remonte au 18 juin dernier, prise par le préfet de l'Yonne où le suspect était en détention pour le viol commis en 2019, 48 heures avant sa libération. La France fait alors une demande de laissez-passer consulaire afin que le jeune homme regagne le Maroc, son pays d'origine. Le 20 juin, il est transféré dans un centre de rétention administratif à Metz, dans l'attente de son expulsion.

Mais les autorités marocaines signalent que la demande de laissez-passer n'est pas valable parce qu'elle a été émise par le mauvais service, la préfecture au lieu de la Direction générale des étrangers en France. La France émet donc une deuxième demande, un mois plus tard. Mais pas de réponse du Maroc. Le suspect du meurtre Philippine passe 75 jours au centre de rétention. Sa retenue administrative est renouvelée trois fois par un juge des libertés et de la détention, avant que ce dernier décide, à la quatrième audience début septembre, de l’assigner à résidence dans un hôtel avec obligation de pointer à la gendarmerie, en attendant le laissez-passer consulaire. Le fameux papier arrive trois jours plus tard. Mais l'homme a déjà disparu dans la nature, en ne respectant pas ses obligations.

Le 19 septembre, il est inscrit au fichier des personnes recherchées. Et le lendemain, il est soupçonné d'avoir tué Philippine, l'étudiante de 19 ans, dans le bois de Boulogne. Le corps de l’étudiante a été retrouvé sans vie, au cours d’une battue.

"Mettre en place un choc de sécurité"

Les syndicats de police dénoncent un laxisme de la part de la justice et demandent plus de fermeté. "Il y a seulement 7% des OQTF qui sont exécutées en France, donc on peut plutôt parler malheureusement d’une invitation puisqu’il n’y a pas de contrainte, pointe Eric Henry, délégué national d'Alliance Police. Cet individu était quand même inscrit au fichier des délinquants sexuels et il était assigné à résidence. Est-ce la faute à pas de chance? Certainement pas. Il s’agit de mettre en place un choc de sécurité. La déclaration du garde des Sceaux, disant que la justice n’est pas laxiste, permettez-nous d’en douter. On libère des individus avant la fin de la peine prononcée et derrière, il n’y a pas de suivi. Nous, les policiers, on attend la mise en place d’une politique pénale extrêmement ferme."

LP avec Pierre Bazin, Cassandre Braud et Guillaume Biet