"Uber shit": "Les flics ne se disent pas qu’il y a de la drogue dans un tacos", témoigne un dealer

Le système à le vent en poupe. Et irrite Gérald Darmanin, en guerre contre le trafic de drogue. Le ministre de l'Intérieur veut faire de la lutte contre la livraison de drogue à domicile, pratique surnommé "Uber Shit", une des priorités de la police.
"La livraison permet de conquérir de nouveaux territoires en s'approchant de ses consommateurs", explique ce jeudi sur RMC et RMC Story Frédéric Ploquin, grand reporter, spécialiste de la police et du grand banditisme. "Le point de deal n'est pas passé de mode mais c'est un endroit dangereux où l'on peut se faire tuer et où le petit personnel, les vendeurs, meurt", poursuit-il.
"Il y a une nouvelle forme de distribution qui s'est mise en place avec les livraisons. Ça a commencé pendant le Covid-19 où les clients ne pouvaient pas se déplacer. Les trafiquants ont donc mis en place la livraison à domicile. Mais ils n'ont rien inventé, ils copient le commerce ordinaire", explique Frédéric Ploquin.
"Les dealers ne se cachent plus, on les voit à chaque coin de rue, c'est comme aller chercher son pain à la boulangerie", assure Ramzy, chauffeur dans les Bouches-du-Rhône. "Le Uber Shit s'est développé quand les consommateurs on commencé à prendre des amendes en allant chercher leur drogue dans les quartiers", ajoute le Marseillais, alors que les policiers peuvent désormais adresser immédiatement des amendes forfaitaires de 200€ aux acheteurs.
Manolo*: "Sur Snapchat il suffit de créer un compte avec "UberShit" et le numéro du département"
Pour éviter ce problème, les trafiquants de drogue livrent donc à domicile et font leur propre publicité sur les réseaux sociaux: "Sans les réseaux, on ne peut rien faire", confirme Manolo, dealer de 17 ans qui vend à domicile dans le Rhône et assure gagner entre 300 et 600 euros par jour grâce au cannabis.
"Sur Snapchat il suffit de créer un compte, de mettre "UberShit" puis le numéro de son département, et les gens ils connaissent, et le retrouvent dans la barre de recherche", explique-t-il. "Tu mets pas de photo des produits sur Snapchat mais tu mets ton compte Telegram (une messagerie sécurisée ndlr), et après les clients viennent voir tes produits et prennent ce qui leur intéresse", raconte-t-il.
Pour passer inaperçu, ce jeune homme, qui a arrêté les cours, explique qu'une partie du trafic passe par des livreurs Ubereats ou Deliveroo, avec de la drogue parfois cachée dans un sandwich: "On prends un bout de shit, on l'entourre de cellophane, on ouvre le tacos, on referme et le client se fait livrer", explique-t-il, assurant "refiler" une partie de la recette au livreur complice.
"Les flics, ils ne vont pas se dire qu’il y a de la drogue à l’intérieur d’un tacos. Donc ça permet plus de sécurité, et d’anonymat, puisque le client ne voit pas nos têtes", explique-t-il.
Un trafic qui se diversifie
Malgré l'explosion d'Uber Shit, Gérald Darmanin se félicite de la disparition de 40% des points de deals dans les Bouches-du-Rhône. Un chiffre qui laisse circonspect habitants et spécialistes: "Je ne sais pas dans quel monde il vit, mais il a tout faux", tacle Ramzy.
Et le trafic se serait déplacé. Sur Uber Shit mais aussi en province, certaines villes moyennes devenant désormais des plaques tournantes: "Fermer un gros point de deal comme à Marseille, près des autoroutes, cela fait éclater le trafic sur tout le territoire", explique Frédéric Ploquin.
Pour lutter contre le nouveau phénomène, le ministre de l'Intérieur veut instaurer un contrôle systématique des livreurs de repas à domicile.