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Manifestation de policiers: pourquoi ce rassemblement est exceptionnel

EXPLIQUEZ-NOUS - Une manifestation de policiers est prévue à 13 heures devant l’Assemblée nationale. En présence du ministre de l'Intérieur et de nombreux “politiques”.

C'est exceptionnel parce qu’on attend beaucoup de monde. Plusieurs milliers de policiers viendront de toute la France, et les syndicats ont appelé les Français à venir les soutenir. On s’attend donc a une manifestation de grande ampleur, ce que l’on a pas vu depuis très longtemps.

Exceptionnel aussi pour le lieu choisi: devant l'Assemblée nationale au moment où est examinée une loi sur la sécurité. Les policiers entendent peser sur les débats de l’Assemblée. Ils demandent des textes plus répressifs contre ceux qui les agressent.

Exceptionnelle, dans ce contexte, est la venue du ministre de l'Intérieur. Gérald Darmanin doit venir saluer les policiers sans prendre la parole mais il va donc participer à cette manifestation qui demande à son gouvernement plus de fermeté. Il va par exemple ainsi se montrer aux côtés de syndicats qui demandent des peines planchers pour les agresseurs de policiers. Alors que Gérald Darmanin fait partie d’un gouvernement qui refuse ces peines minimales. 

Pour toutes ces raisons, ce rassemblement est tout à fait exceptionnel au sens où l’on a jamais vu ça.

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La plus grande partie de la classe politique sera présente

Les politiques répondent aux syndicats de policiers qui leur ont demandé de venir leur apporter leur soutien, après la mort du brigadier Eric Masson à Avignon et de Stephanie Monfermé à Rambouillet. On verra donc tout à l’heure, à gauche, le patron du PS Olivier Faure, le candidat du PC, Fabien Roussel, l’écologiste Yannick Jadot. Mais pas Jean-Luc Mélenchon ni aucun élu de La France insoumise qui dénoncent une récupération politique. A droite, on verra les principaux leaders des républicains. Eric Ciotti , Bruno Retailleau entre autres.

Le Rassemblement national sera représenté par son numéro deux Jordan Bardella mais pas par Marine Le Pen qui ne sera pas là et qui n'a pas expliqué pourquoi. Aucun des élus ne prendra la parole. Seuls, des policiers et leurs représentants syndicaux s'exprimeront à la tribune. Tribune qui a été installée devant l'Assemblée. Il n’est pas prévu de défilé. C’est un rassemblement statique qui devrait se terminer par une Marseillaise et une minute de silence.

Les policiers ont-ils le droit de manifester ?

Oui à condition de le faire hors service, sur leur temps de repos ou en posant une journée de vacances. A condition aussi de ne pas être en uniforme et de ne pas porter leur armes de service. Le code de déontologie de la police prévoit qu’un fonctionnaire peut s’exprimer librement dans la limite de la loyauté à l'égard des institutions de la république.

Les policiers ont le droit de se syndiquer mais pas depuis si longtemps. Cela date de 1983. Les militaires et donc les gendarmes eux n’ont pas de syndicats. Les policiers enfin n’ont pas le droit de faire grève. Comme les magistrats et les gardiens de prison.

Il y a quand même eu ces dernières années des manifestations de policiers, y compris en uniforme

Régulièrement, des mouvements de colère et des rassemblements de quelques centaines de policiers prennent place. Souvent la nuit, généralement avec leurs voitures et les gyrophares. On a vu cela en décembre dernier lorsque Emmanuel Macron a dénoncé dans une interview les contrôles au faciès.

Il y avait eu de nombreux rassemblements spontanés aussi en octobre 2016 après les événements de Viry-Châtillon lorsque des policiers avaient failli brûler dans leur voiture. Rassemblements interdits mais généralement pas sanctionnés. Mais pour voir des manifestations de policiers de grande ampleur il faut remonter beaucoup plus loin.

En juin 1983, après les obsèques de deux policiers tués par Action directe, plusieurs milliers de policiers en civil mais avec leurs armes s'étaient rendu devant le ministre de la Justice pour réclamer la démission de Robert Badinter. Les images de ces fonctionnaires dont certains avaient leur pistolet à la main avaient créé un choc.

Et puis en mars 1958, 6.000 policiers avaient déjà manifesté devant l'Assemblée nationale, déjà à l’occasion de l’examen d’un texte sur la sécurité. Déjà après la mort d’un gardien de la paix. Les députés avaient dû interrompre les débats, on avait dit alors que la démocratie avait tremblé. 

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Nicolas Poincaré (avec J.A.)