Manifestations: "Les Brav-M ne sont pas formées au maintien de l'ordre", assure un CRS
Depuis l'utilisation du 49.3 sur la réforme des retraites le 16 mars, des manifestations spontanées ont lieu chaque jour dans de nombreuses villes de France. Ces rassemblements ont été émaillés d'incidents violents et d'interpellations controversées. Plusieurs associations de défense des droits de l'homme, le syndicat de la magistrature et le syndicat des avocats ont dénoncé des "dérives inacceptables".
De nombreuses vidéos font état de violences contre des manifestants, des journalistes et parfois même des passants ne participant aux rassemblements. D'autres vidéos montrent de violentes charges de police sans interpellation dans la foulée.
Lundi soir, un policier de la Brav-M, la Brigade de répression de l'action violente motorisée, reconnaissable à son casque de moto, a été filmé assénant un violent coup de poing à un homme qui reculait ne présentant a priori pas de menace directe. Interrogé à propos de ce coup de poing, le préfet de police de Paris Laurent Nuñez a assuré mardi sur BFMTV avoir besoin de "contextualiser, savoir dans quel cadre ça s'est passé", ajoutant avoir demandé une enquête administrative.
"Certains casseurs se mêlent à des gens plus ou moins pacifistes"
Dans la foulée, c'est la vidéo d'un homme présenté comme un SDF, mis à terre puis insulté par plusieurs CRS place de la République à Paris mardi soir, qui a fait le tour des réseaux sociaux.
De quoi s'interroger sur la doctrine du maintien de l'ordre en France, émaillé de nombreux incidents ces dernières années. "Les Brav-M ne sont pas formées au maintien de l’ordre", déplore ce mercredi sur le plateau des "Grandes Gueules", Jérôme, un CRS.
"Les Brav-M ont été créées pendant les "gilets jaunes" parce qu’on n’était pas assez nombreux, parce que le préfet Didier Lallement avait la mainmise sur eux et que nous CRS, nous sommes une autre direction. Il n'avait pas la mainmise sur nous et ça ne lui plaisait pas", raconte-t-il sur RMC et RMC Story.
"Aujourd'hui, on est là en observation. On intervient uniquement si ça dégénère. Il y a des petits groupes le soir qui se forment, qui font un peu tout et n'importe quoi. Parfois, certains casseurs se mêlent à des gens plus ou moins pacifistes qui peuvent faire barrage pour nous empêcher d’interpeller ces casseurs. Et quand on charge, au niveau de l'impact, ça fait de telles images", ajoute le fonctionnaire.
"Les personnes qui sont censées nous protéger sont capables de mettre des coups de poing et mettre KO des personnes sans protection. Ça fait peur. En tant que citoyenne, je me suis sentie très mal en voyant certaines images", déplore de son côté Charlotte, graphiste dans l'Indre-et-Loire. "Il y a des gens mal formés qui font du mal à l'institution de la police et donnent une mauvaise image", estime-t-elle.
Deux mineurs autrichiens en voyage scolaire interpellés puis relâchés
Autre motif de crispation sur le terrain des manifestations, de nombreuses interpellations de manifestants et parfois même de passants qualifiées d'injustifiées. La Défenseure des droits Claire Hédon se dit "préoccupée" et "inquiète" à propos de ces interpellations préventives menées par les forces de l'ordre.
Sur 425 personnes placées en garde à vue lors des trois premières soirées de manifestations spontanées, de jeudi à samedi, seules 52 ont fait l'objet de poursuites à l'issue de leur garde à vue. "On estime que c'est un usage dévoyé de la garde à vue, au seul fin de casser les manifestations. Manifester, ce n'est pas une infraction", alerte sur RMC Samra Lambert, du syndicat de la magistrature.
"Il n'y a pas d'interpellations injustifiées, je ne peux pas laisser dire ça", a réagi mardi sur BFMTV le préfet de police de Paris Laurent Nuñez. Pourtant, des interpellations injustifiées, il y en a eu au moins deux dans la nuit de jeudi à vendredi. Deux Autrichiens de 15 ans, en voyage scolaire, ont été interpellés place de la Concorde à Paris puis retenus une nuit au commissariat avant d'être libérés après une intervention de l'ambassade d'Autriche, comme le rapporte Libération.
De son côté, Le Monde rapporte la mésaventure d'un joggeur, empêché de quitter une nasse avant d'être embarqué au commissariat le même soir. Pour avoir voulu courir au mauvais endroit au mauvais moment, donc.