"On n’y va pas quand on est en danger": les règles des secours lors des manifestations violentes
Que s'est-il passé ce samedi 25 mars à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) lors de la manifestation contre les méga-bassines? Selon La Ligue des droits de l'homme, les autorités auraient empêché le Samu de porter secours à un manifestant gravement blessé à la tête lors de violents affrontements entre opposants au projet de méga-bassine et forces de l'ordre. Dans un enregistrement diffusé par Le Monde et Mediapart, on entend distinctement un médecin du Samu assurer ne pas avoir le droit d'intervenir.
"On n'enverra pas d'hélico ou de moyen Smur sur place parce qu'on n'a pas ordre d'en envoyer par les forces de l'ordre", assure un régulateur du Samu à un observateur de la Ligue des droits de l'homme qui lui rétorque que la situation est calme depuis 30 minutes. "Vous n'êtes pas le premier à nous le dire. Le problème, c'est que c'est à l'appréciation des forces de l'ordre et qu'on est sous un commandement qui n'est pas nous", lui répond le régulateur.
Ce mercredi, la préfète des Deux-Sèvres Emmanuelle Dubée a estimé sur BFMTV que c'était une "insulte" d'insinuer que les forces de l'ordre ont empêché les secours de porter assistance à des personnes blessées: "C'est une insulte de dire qu'il y a eu un blocage fait sciemment des forces de l'ordre pour empêcher de porter secours".
"La règle de base quand on envoie des personnels du Samu, quand on envoie des pompiers, c’est d’assurer en premier lieu leur sécurité. Ces conditions n’étaient pas réunies en tout lieu, à tout moment, le 25 mars", a-t-elle ajouté.
"On n'ira pas porter assistance à un blessé tant que les équipes médicales ne seront pas sécurisées"
Elise, infirmière en Seine-et-Marne qui a travaillé au Smur (Service mobile d'urgence et de réanimation) pendant quelques années, confirme ce mercredi sur RMC cette doctrine en place. "On ne va pas sur le lieu d'une intervention quand on est potentiellement en danger", assure-t-elle aux "Grandes Gueules".
"En général, sur de telles manifestations, il y a des organisations de secours faites en amont au niveau du cabinet du préfet avec un directeur des opérations médicales, un directeur des opérations de secours entre pompiers, gendarmerie et services médicaux du 15. On sait tous qu'on n'ira pas en première intention porter assistance à un blessé tant que les équipes médicales ne seront pas sécurisées", explique-t-elle.
L'infirmière rappelle également que les camions de secours sont souvent remplis de matière explosive comme de l'oxygène. Leur proximité avec des affrontements violents peut donc se révéler dangereuse.
"Tout peut évoluer en 30 secondes"
"Je ne peux pas me permettre d'intuber un patient avec de l'oxygène avec des cocktails molotov qui me passent au-dessus de la tête. Je prends un risque pour mon métier, moi et mon patient", insiste-t-elle, rappelant qu'elle n'a ni casque, ni gilet en intervention. "Ce sont les forces de l'ordre ou les pompiers qui extraient les blessés", précise-t-elle, ajoutant qu'"un secouriste à terre est un secouriste inutile".
Concernant la manifestation de Sainte-Soline, Elise assure qu'elle n'aurait pas bougé de son camion en voyant la violence des affrontements entre manifestants et force de l'ordre. "Sur les images, on voit que tout peut évoluer en l'espace de 30 secondes. Quelle décision on prend?", interroge-t-elle.
Depuis la manifestation de samedi, la famille d'un homme, entre la vie et la mort, a porté plainte contre X pour "tentative de meurtre et entrave volontaire à l'arrivée des secours", indique ce mercredi le parquet de Rennes. Ce manifestant de 32 ans, originaire de Toulouse, a été grièvement blessé à la tête à l'occasion de la manifestation contre la méga-bassine de Sainte-Soline.