Que changerait l'intégration du consentement dans la définition pénale du viol ?

Lors de la passation de pouvoirs, mardi, Aurore Bergé, nommée ministre de l'Égalité femmes-homme, a redit sa volonté d'intégrer la notion de consentement dans la définition du viol. Une position partagée par le nouveau Premier ministre François Bayrou et même le président de la République Emmanuel Macron, en mars dernier. Pourtant, depuis, toujours rien.
La France tourne autour du consentement depuis 10 ans, avec la signature de la convention européenne d’Istanbul contre les violences faites aux femmes. Depuis 10 ans, nombreux rendez-vous ont surtout été manqués. Le dernier en date, en début d’année lorsqu'Emmanuel Macron a refusé d’adopter une directive européenne sur une définition commune du viol intégrant la notion de consentement. Avant de faire volte-face au printemps dernier.
Le viol, une notion mal perçue par le grand public
Intégrer la notion de consentement serait un gage de lisibilité et de pédagogie. Au procès des viols de Mazan, la définition actuelle du viol n'a pas toujours été bien comprise par le grand public. Le code pénal le définit comme toute pénétration imposée par menace, violence, surprise ou contrainte.
Il faut ensuite pouvoir démontrer que l’auteur a mis en œuvre l’un de ses quatre éléments constitutifs. Problème, hors du cadre d'un viol sous la menace d'un couteau ou des coups de poing, les notions de contrainte et de surprise sont parfois mal comprises et tournent autour de la question du consentement sans le nommer. La majorité des 51 accusés a ainsi fait valoir qu'ils n'étaient pas des violeurs parce qu'ils n'avaient pas eu l'intention de violer, alors qu'ils admettaient avoir eu des relations sexuelles avec une femme endormie.
Des féministes et des professionnels du droit contre
Pourtant, même parmi les féministes, l’introduction du consentement dans le code pénal ne fait pas consensus. La raison, que le regard de la justice ne se pose plus sur le comportement de l’agresseur mais sur celui de la victime. Une inquiétude notamment partagée par le Collectif féministe contre le viol et certains professionnels du droit dont des magistrats et des avocats.
Concrètement, au lieu d'interroger le mis en cause sur la stratégie et les moyens qu'il a mis en oeuvre pour imposer des relations sexuelles à la victime, c'est la victime qui est interrogée, sur les moyens qu'elle a mis en oeuvre pour résister à son agresseur.
En réalité c'est déjà le cas dans un procès criminel. C'est notamment ce qu'on appelle la victimisation secondaire, c'est le fait d'imputer, par les questions que l'on pose, une certaine responsabilité à la victime dans les viols qu'elle a subis. Pour se prémunir de ce biais, certains pays comme le Canada, le Royaume Uni ont par exemple interdit d'évoquer le passé sexuel d'une plaignante.
Gérald Darmanin, ministre de la Justice, avait été accusé de viol
Deux propositions de loi transpartisanes ont été déposées le jour du verdict du procès des viols de Mazan. Une troisième au moins le sera en janvier par LFI. Ce qui pose problème réside dans la formulation. Pour le moment, les députés s'inspirent du droit belge. Ce serait notre définition actuelle du viol, celle dont on a parlé précédemment, en précisant sur "une personne qui n'y consent pas". Le texte pourrait être inscrit à l'ordre du jour au printemps.
Gérald Darmanin, nouveau ministre de la Justice et garde des Sceaux, sera chargé de le superviser. C'est là c'est le coup de massue pour les féministes qui s'insurgent que ce dossier soit confié à un homme accusé d'avoir obtenu les faveurs sexuelles de deux femmes qui avaient sollicité son soutien d'élu. Il a fait l'objet d'une plainte pour viol et abus de faiblesse et a bénéficié d'un non lieu et d'un classement sans suite. Cela annonce néamoins des des échanges tendus à l'Assemblée et à l'extérieur.