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Police-Justice

Yvan Colonna: un rapport parlementaire attendu avec des "zones d'ombre" en suspens

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Un rapport parlementaire très attendu, sur la mort d'Yvan Colonna, survenue le 2 mars 2022, doit être rendu ce mardi 30 mai. Mais cette enquête ne semble pas avoir éclairci toutes les "zones d'ombre" selon un parlementaire.

Plus d'un an après le meurtre d'Yvan Colonna, tué à la prison d'Arles par un autre détenu le 2 mars 2022, la Commission d'enquête parlementaire doit rendre son rapport ce mardi 30 mai. Le groupe de parlementaires a enquêté depuis le 23 novembre dernier sur les dysfonctionnements de l'administration pénitentiaire qui ont conduit à l'agression d'Yvan Colonna.

Au cours de son enquête, dans laquelle 71 personnes ont été entendues, la commission a tenté de comprendre pourquoi Franck Elong Abé, l'homme de 36 ans considéré comme suspect dans cette affaire, était en détention "ordinaire" malgré sa dangerosité, avérée par son passif et son comportement en prison.

Malgré de multiples incidents, l'homme avait obtenu, fin 2021, le statut convoité d'auxiliaire. Il travaillait pour l'administration pénitentiaire en faisant le ménage de la prison, et notamment de la salle de sport où il a agressé Yvan Colonna.

8 minutes d'agression, sans aucune intervention

Les parlementaires ont aussi essayé de savoir comment les deux hommes avaient pu être laissés seuls dans cette salle. L'agression, perpétrée par cet homme condamné dans un dossier terroriste, a duré 8 minutes et a été filmée par les caméras de vidéosurveillance, sans que personne n'intervienne.

Les avocats d'Yvan Colonna espèrent enfin comprendre pourquoi il n'a jamais été rapatrié dans une prison corse au titre du rapprochement familial... malgré un comportement exemplaire en détention.

Mais sur ce point, peu de réponses sont apportées par l'enquête, estime un membre de la commission. Philippe Juvin, député LR, explique en effet qu'il y a "deux grandes zones d'ombre" dans le dossier.

Si la première concerne les raisons "incompréhensibles" qui ont poussé l'administration à laisser l'assassin présumé dans un quartier classique de la prison, "au contact des autres prisonniers", la seconde porte sur "pourquoi Colonna, Ferrandi et Alessandri (NDLR : les deux complices d'Yvan Colonna) n'ont pas bénéficié du rapprochement familial".

"J'espère que l'enquête judiciaire prolongera les résultats de l'enquête parlementaire"", ajoute Philippe Juvin.

Des nouvelles plaintes contre l'Etat?

En attendant les résultats de l'enquête judiciaire, l'inspection générale de la justice avait déjà conclu, lors d'une inspection administrative, à des manquements de la part d'un surveillant et de l'ex-directrice de la prison, en poste jusqu'à 10 jours avant l'agression. Le surveillant avait fait preuve d'un "net défaut de vigilance" en restant éloigné du lieu de l'agression sans aucun motif.

Le rapport avait également pointé l'insuffisance du management de l'ex-directrice et l'absence de gestion appropriée des commissions d'évaluation de la dangerosité des détenus.

La famille d'Yvan Colonna avait porté plainte en avril 2022, estimant l'administration pénitentiaire juridiquement responsable du décès. La famille estimait le préjudice à 1 million d'euros. L'Etat a proposé 240 000 euros au total aux membres de la famille. "Une partie des membres a accepté mais l'action est toujours en cours", expliquait l'avocat de la famille Me Spinosi.

Un autre avocat de la famille, Maître Cormier, a dévoilé que les proches d'Yvan Colonna prévoient déjà de mener une nouvelle action en justice contre l'Etat. "Nous allons déposer des plaintes, car nous pensons qu'il y a une certaine forme d'entrave à la manifestation de la vérité, peut-être des dissimulations de preuves", a précisé le conseil de la famille Colonna.

Martin Bourdin, Alexis Lalemant