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Du secteur du vin à l’Elysée: une ex-lobbyiste devenue conseillère d’Emmanuel Macron

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Selon Le Monde, Audrey Bourolleau, ancienne lobbyiste de la filière viticole puis conseillère agriculture auprès d'Emmanuel Macron, a continué à défendre les intérêts du lobby du vin à l’Elysée.

Audrey Bourolleau a 41 ans, une belle carrière, assez linéaire. Car à part un passage dans le groupe Bic, elle n’a jamais travaillé que dans le domaine des vins et spiritueux: Groupe Baron Philippe de Rothschild, France Boissons, syndicat des Côtes de Bordeaux. Mais surtout, en 2012, elle devient déléguée générale de "Vins et Société", le très puissant lobby viticole français.

C’est elle, notamment, qui avait obtenu une révision de la loi Evin, que le monde de la santé avait alors dénoncée comme un affaiblissement de la lutte contre les méfaits de l’alcool. Bref, elle fait si bien son métier, Audrey Bourolleau, qu’en 2014, la Revue du Vin de France lui décerne le titre de femme de l’année.

Or, c’est elle qu’Emmanuel Macron choisit en 2017 à l’Elysée comme conseillère "agriculture, pêche, forêt et développement rural". Colère de la communauté médicale, choquée qu’une lobbyiste du vin puisse s’immiscer au cœur du pouvoir quand l’alcool est responsable de 41.000 décès prématurés par an.

Or, à l’Elysée, elle aurait continué à défendre les intérêts du lobby viticole. Le journal Le Monde s’est procuré des documents confidentiels et notamment des emails où elle apparaît comme "une facilitatrice du lobby alcoolier à l’Elysée".

Edulcoration des politiques publiques sur la consommation d'alcool

Audrey Bourolleau serait directement intervenue sur les politiques publiques de lutte contre l’alcool, notamment lors de la rédaction du plan national contre les addictions. En gros, elle aurait édulcoré la stratégie du gouvernement. La phrase qui était prévue dans le plan était celle-là : "L’enjeu est de communiquer sur le fait que toute consommation d’alcool comporte des risques". Et voilà finalement la phrase qui sera retenue après son intervention : "L’enjeu est de communiquer sur le fait que les risques liés à la consommation d’alcool augmentent avec la quantité consommée". Vous voyez la nuance?

De là à supposer que l’arbitrage s’est fait au nom des intérêts économiques de la filière et non pour des raisons de santé publique, il n’y a qu’un pas. Mais Audrey Bourolleau est-elle vraiment la seule responsable? Et non. C’est le président qui a tranché. C’est lui, et lui seul, qui veut s’attirer les bonnes grâces du monde du vin. La preuve: Audrey Bourolleau, qui a quitté son poste à l’Elysée en juillet 2019 pour rejoindre un campus agricole dans les Yvelines, vient d’être appelé par le candidat Macron pour s’occuper, dans son équipe de campagne, des questions d’agriculture et d’alimentation. Moralité: on ne change pas une équipe qui pense comme le président…

Laurent Neumann