Mort de Louis Mermaz, figure socialiste et ex-président de l'Assemblée nationale, à 92 ans

Louis Mermaz, le 29 mai 2018 - Joël SAGET / AFP
Il fut le premier président socialiste de l'Assemblée nationale sous la Ve République. Fidèle "compagnon de route" de François Mitterrand, Louis Mermaz s'est éteint, ont indiqué ce jeudi 15 août 2024 plusieurs politiciens de gauche. Né à Paris le 20 août 1931, il part quelque jour avant son 93e anniversaire.
Après Roland Dumas en juillet, Robert Badinter en février, Louis Le Pensec en janvier, ou encore Gérard Collomb en novembre et même Louis Mexandeau l'année dernière, c'est un autre baron socialiste qui s'en va.
Soixante ans de vie politique
Rêvant "d'un destin", Louis Mermaz songe très tôt à la politique et écrit pour l'hebdomadaire Le Réveil Normand dès l'âge de 14 ans pour se "faire connaître", note l'AFP.
Il entre en politique dans les années 1950 à l'Union démocratique et socialiste de la Résistance. C'est là où il rencontre le futur président de la République, auquel il restera fidèle durant toute sa carrière, puisqu'il l'accompagnera dans la défaite comme dans le succès.
Élu pour la première fois dans l'Isère aux législatives de 1967, il devient une figure de ce département. Il en fera son fief électoral puisqu'il en sera sept fois député, mais aussi président du conseil général pendant quinze ans, maire de Vienne durant trente ans (1971-2001) et enfin sénateur dix ans.
Sa loyauté à François Mitterrand est récompensée après la victoire à la présidentielle de 1981. Elle lui permet d'accéder au perchoir de l'Assemblée nationale, qu'il occupe durant cinq ans (1981-1986), après avoir été ministre de l'Équipement (1981), et avant d'être nommé ministre des Transports (1988).

Arrivé avec la réputation de sectaire, il quitte sa fonction de président de l'hémicycle avec l'estime de tous ses collègues. "Vous êtes entré partisan, vous êtes sorti président", salue Jean-Claude Gaudin, alors patron du groupe UDF.
Dans la foulée de la réélection du président socialiste en 1988, il exerce la fonction stratégique de chef du groupe socialiste au Palais-Bourbon, avant d'officier comme ministre de l'Agriculture (1990-1992) puis porte-parole du gouvernement et ministre des Relations avec le Parlement (1992-1993).

Il retrouve les bancs de l'Assemblée nationale à partir de 1997, puis ceux du Sénat dès 2001, jusqu'à sa retraite politique en 2011.
En 2006 puis en 2011, il soutient la candidature de Ségolène Royal à l'élection présidentielle tout en regrettant le caractère "imprévisible" de la présidente de la région Poitou-Charentes.
Archives et mémoires
Ses mémoires parues en 2013, Il faut que je vous dise, racontent ses origines et sa vie politique, relève le journal Le Monde.
Cet agrégé d'histoire a attendu la sortie de son livre testament, à 82 ans, pour révéler qu'il était le fils illégitime d'un ministre de la IIIe République, Louis de Chappedelaine, pour lequel travaillait sa mère. "Bon petit chrétien", Louis Mermaz ne porta jamais le nom de son père, déjà marié, mais garda ce secret toute sa carrière comme un "lourd handicap", "une souffrance ancienne (...) enfouie".
Marié, père de trois enfants, il perdit ses deux fils prématurément, Frédéric, noyé à 20 ans à Cabourg, et Pierre qui se suicida en 2003. "Deux drames qui bouleversèrent tout", écrit-il.
En 2015, il lègue aux archives nationales 200 cartons de documents constituant ses archives publiques et privées, à l’origine de la création fonds Louis-Mermaz retraçant cinquante ans d’histoire de la gauche, souligne le journal Libération.
"L’important, c’est ce qui se passe après la mort", déclarait Louis Mermaz au quotidien régional Le Dauphiné Libéré en mars 2024.
"Un vrai modèle"
Sa disparition a notamment été annoncée par le président du conseil départemental de l'Essonne François Durovray sur le réseau social X, honorant une "figure éminente de la vie politique". "Son engagement au service de notre pays a marqué son histoire."
La pluie d'hommages ne s'est pas fait attendre, à commencer par celui du premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, qui a fait part de son "immense tristesse" et salué son illustre aîné dont l'"esprit vif (les) accompagnait dans tous (leurs) combats".
L'ancien président François Hollande a pour sa part déploré la perte d'un "ami cher et fidèle" dont il aimait l'"érudition", la "mémoire" et "l'humour". "Les socialistes perdent un militant exemplaire, les historiens un des témoins les plus précieux de la période contemporaine, et les Français un des acteurs majeurs des années Mitterrand."
"C'était un vrai modèle de défense des libertés publiques et des droits de l'être humain", a réagi pour sa part le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon, qui a longtemps milité au PS, témoignant lui aussi de son "affliction".
Comme le rapporte Le Dauphiné Libéré, le monde politique isérois n'a pas tardé à réagir au décès de Louis Mermaz, et de nombreux élus locaux - du même bord politique ou d'autres partis - lui ont rendu des hommages appuyés.