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"Une très mauvaise nouvelle": milieux enseignants et culturels en colère après le gel du Pass Culture collectif

La ministre de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, s'adresse aux journalistes à sa sortie du lycée Emile Zola, quelques jours après un accident de car scolaire à Châteaudun, le 3 février 2025.

La ministre de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, s'adresse aux journalistes à sa sortie du lycée Emile Zola, quelques jours après un accident de car scolaire à Châteaudun, le 3 février 2025. - JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

Les établissements scolaires ont appris jeudi le gel jusqu'à la fin de l'année scolaire du budget alloué à la part collective du pass Culture, un dispositif qui permet aux collèges et lycées de mener des projets culturels (cinéma, spectacles vivants, etc.). Cette annonce surprise a suscité de vives réactions des syndicats d'enseignants et de chefs d'établissements.

Le gel jusqu'à la fin de l'année scolaire du budget du Pass Culture collectif, un dispositif qui permet de financer des projets et sorties culturels de collégiens et lycéens, révolte enseignants et monde de la culture qui dénoncent un "coup de massue". "C'est violent", déplore Marion Chopinet, professeure d'histoire-géographie et théâtre dans un lycée de Marseille, dans lequel "une grande partie des projets" culturels sont financés via la part collective du Pass Culture.

"On avait prévu de faire venir des compagnies pour mars et avril, et comme on n'avait pas fini de valider et de finaliser administrativement le projet, j'ai dû les contacter ce week-end pour leur dire que, pour l'instant, c'est terminé", ajoute-t-elle.

"C'est une annonce au dernier moment", abonde Karine Nazury, principale de collège dans l'académie de Nice. "On prévoit sur l'année que tous les élèves du collège assisteront au moins une fois à un spectacle de théâtre. Là, nous avons réussi à faire passer les troisièmes, les sixièmes et même pas la moitié des quatrièmes. Les autres seront pénalisés".

L'annonce par les rectorats en fin de semaine dernière du gel du budget alloué à la part collective du Pass Culture - pendant pour les établissements scolaires de ce Pass (qui accorde aux jeunes de 15 à 18 ans 300 euros à dépenser dans la culture)- a suscité de vives réactions. Les chefs d'établissements du SNPDEN-Unsa ont dénoncé "un hold-up". Les parents d'élèves de la FCPE et la Peep ont demandé respectivement de "ne pas sacrifier l'accès des jeunes à la culture" et de "revenir" sur cette décision.

Situation budgétaire

Le monde de la culture est monté aussi au créneau. "En salles ce matin, on a dû renvoyer des élèves qui venaient assister à des séances" car elles n'étaient plus financées, a indiqué Guillaume Bachy, président de l'AFCAE (Association des cinémas d'art et essai). "On ne peut pas du jour au lendemain arrêter un dispositif."

"C'est une très mauvaise nouvelle", a réagi Ghislain Gauthier, secrétaire général de la FNSAC CGT. "La part collective du pass Culture permet à de nombreux artistes et acteurs culturels de travailler". "C'est l'idée même du service public qui est touchée", a indiqué Emmanuel Demarcy-Mota, directeur du Théâtre Sarah-Bernhardt (ex-Théâtre de la Ville) à Paris.

Lundi après-midi, une quarantaine de personnes se sont rassemblées devant l'Assemblée nationale "contre le gel brutal du Pass culture". "Tout ce qui était en cours de tractations (entre compagnies et établissements, ndlr) est annulé", a regretté David Ruellan, élu au Synavi (syndicat national des arts vivants).

Dispositif géré par le ministère de l'Éducation, le Pass Culture collectif devrait disposer en 2025 d'un budget de 72 millions d'euros. Mais en ce début 2025, "au regard de la situation budgétaire", il a été demandé aux rectorats "d'inciter les établissements n'ayant pas encore réservé d'action pour l'année en cours à le faire pour bloquer les crédits: 50 millions d'euros jusqu'en juin et 22 millions d'euros entre septembre et décembre", a expliqué le ministère.

"Porte de sortie"

S'en est suivi un "emballement" sur la plateforme dédiée aux inscriptions de projets, et le plafond de 50 millions a été atteint vendredi, ajoute le ministère.

"Je suis restée connectée jeudi soir jusqu'à plus de 22h30 pour rentrer les derniers projets", raconte Marie Tamboura, principale d'un collège de Montreuil (Seine-Saint-Denis). Mais "j'ai toute une série d'actions qui ne pourront pas se dérouler", regrette-t-elle, citant des sorties à la Cité des sciences et au Mémorial de la Shoah ou un projet avec la Comédie Française. "C'est un coup de massue".

La ministre de l'Éducation Elisabeth Borne a assuré lundi que "l'objectif de proposer des enseignements artistiques et culturels aux élèves" restait "intact", et annoncé que le ministère menait "un recensement des projets engagés qui n'auraient pas pu être validés pour cette année scolaire".

"Il faut que le ministère assume ses responsabilités et trouve rapidement une porte de sortie qui permette de sécuriser l'ensemble des projets qui étaient envisagés", estime Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat des collèges et lycées.

C.A avec AFP