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Puy-de-Dôme: le spectre d'un Sainte-Soline "bis" à l'aube d'un projet de mégabassines qui divise

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Un projet de création de deux mégabassines dans le Puy-de-Dôme, non loin de Clermont-Ferrand, crée la discorde. Un débat en écho de celui né des contestations de la mégabassine de Sainte-Soline.

Le Puy-de-Dôme sera-t-il à son tour le théâtre de violences autour d'un projet de mégabassines? S'il est impossible de le prédire, les éléments de contestation sur place sont bien présents.

Un projet de création de deux mégabassines, des retenues d’eau de 15 à 18 hectares pour assurer l'approvisionnement de 36 exploitations, pourrait voir le jour en 2026. Mais à l'image du projet de Sainte-Soline, des locaux sont vent debout contre l'idée portée par des agriculteurs du secteur, notamment spécialisés dans la production de maïs à Saint-Georges-sur-Allier et à Bouzel.

"On est contre tout projet de mégabassine, et la raison est évidente : le partage de la ressource et la nécessité de faire en sorte que l'intégralité des bénéficiaires de l'eau puissent en profiter, pas seulement 36 contributeurs qui se trouvent au bon endroit", estime Ludovic Landais, porte-parole de la Confédération paysanne dans le Puy-de-Dôme, invité de l'émission Charles Matin sur RMC.

"Aucune chance" de remplir les bassines

Comme l'explique Ludovic Landais, "l'idée générale est de pomper dans la rivière Allier alors que les niveaux sont déjà assez difficilement atteignables pour pouvoir remplir les bassines". Un pompage qui n'aurait lieu qu'entre novembre et mars, selon l'Association syndicale libre des Turlurons qui regroupe les 36 exploitants derrière le projet.

L'invité de Charles Matin : Ludovic Landais - 09/08
L'invité de Charles Matin : Ludovic Landais - 09/08
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Mais "suivant les études hydrologiques, il y a très peu de chances pour qu'ils puissent intégralement remplir les bassines sans avoir la nécessité de dérogations" pour pomper l'eau à d'autres moments de l'année, juge Ludovic Landais.

"Sans prendre de risques inconsidérés, il n'y a presque aucune chance pour qu'ils puissent remplir ces bassines", avance Ludovic Landais, porte-parole de la Confédération paysanne.

Un discours à mettre en opposition totale à celui de Thierry, viticulteur dans le Tarn qui a contacté le 32 16 pour intervenir dans le débat mené dans les Grandes Gueules, sur RMC et RMC Story.

Pour lui, les bassines, "c'est indispensable". Thierry explique qu'avec "de plus en plus d'années de sécheresse, si on ne stocke pas l'eau quand elle passe ou quand les nappes sont à ras-la-gueule, on n'y arrivera pas". Et de prendre pour exemple qu'en France, selon lui, "on récupère 2% de l'eau de pluie tandis qu'en Espagne, c'est 20%".

La "souveraineté alimentaire", pas au coeur du projet

Au-delà de la question de la récupération de l'eau, c'est aussi le modèle global de l'agriculture qui s'apparente comme étant le débat sous-jacent de ce sujet des mégabassines.

Car pour Ludovic Landais, le projet de récupération d'eau dans l'Allier (la rivière), n'est même pas la conséquence d'une idée de souveraineté alimentaire française. Selon lui, les deux mégabassines locales serviront à irriguer 800 Ha de champs qui servent à produire notamment du maïs à destination animale.

"Si on fait 800 ha de maraîchage autour de Clermont-Ferrand on va évidemment répondre à la souveraineté alimentaire… On a bien compris que le projet n'était pas de faire de l'alimentation ici", assène Ludovic Landais, porte-parole de la Confédération paysanne.

"Produire pour faire de l'export, on est sur un modèle agricole qui est un petit peu sur sa fin. Il faut qu'on gagne davantage à produire plus près, mieux, à gagner en souveraineté alimentaire et en qualité", revendique-t-il encore.

Pour Étienne Liebig enfin, il faut de la mesure dans les deux camps. "Il y a beaucoup de stupidité dans les actions violentes (semblables à celles de Sainte-Soline) car ça dresse les Français les uns contre les autres. Mais il y aussi beaucoup de stupidité dans ceux qui refusent de voir qu'on vit un problème et qu'il faut évoluer", plaidant lui aussi pour une adaptation de l'agriculture face aux défis posés par le réchauffement climatique.

"N'oublions pas la hiérarchie des usages de l'eau : l'eau potable d'abord, ensuite l'assainissement, puis l'agriculture et dans celle-ci, l'agriculture nourricière avant l'agriculture d'export", conclut de son côté Ludovic Landais de la Confédération paysane.

A.L