Enseignement sur tablettes: quand les collèges font machine arrière

L'enseignement sur tablette numérique aurait-il du plomb dans l'aile? Le président du Conseil scientifique de l'Education nationale a récemment alerté sur l'impact des outils numériques sur les apprentissages. Stanislas Dehaene a mis en garde les enseignants et formateurs lors d'un colloque, la semaine dernière, expliquant notamment que certaines interventions de neuroscientifiques "font réfléchir et incitent à davantage de recherches sur l'utilisation des écrans en matière éducative".
Déjà en février, Jean-Michel Blanquer fustigeait le "plan tablettes" de François Hollande, qui devait doter chaque élève d'une tablette. Le programme n'a pas été reconduit. Pour le ministre de l'éducation, il ne sert à rien de "déverser des pluies de tablettes indifférenciées", il vaut mieux penser des "projets cohérents" en amont.
Et localement, certains établissements font machine arrière. Au collège Les Perrières d'Annonay dans l'Ardèche, les parents d'élèves comme cette mère de deux garçons l'ont constaté: la tablette tactile n'est pas souvent dans le sac à dos. "Certains profs demandaient à ce qu'ils aient leur tablette chargée, mais pas souvent. J'ai vu que mes enfants avaient quand même leurs livres. D'ailleurs la tablette restait plus souvent à la maison que les livres. J'ai trouvé ça inutile qu'ils fournissent des tablettes alors qu'ils ne l'utilisent pas".
"Pas de personnel pour la maintenance informatique"
1.000 élèves auraient dû être équipés entre 2016 et 2018. Mais seulement 400 tablettes ont été distribuées, à cause notamment de problèmes techniques selon Olivier Jeunet, professeur de maths et secrétaire départemental du syndicat SNES-FSU:
"Il y a tous les problèmes liés à du matériel informatique. Dans un établissement scolaire, il n'y a pas de personnel qui est là pour s'occuper de la maintenance informatique. Dès qu'une tablette tombait en panne, il y en avait pour une semaine, donc le temps d'apprentissage pour les élèves peut être très long, on aurait pu faire beaucoup plus vite sur papier".
L'intérêt pédagogique était surtout limité pour les enseignants. Stéphanie Barbato est la vice-présidente du Conseil Général en charge de l'Education: "On s'est rendu compte qu'il y avait quelques professeurs très investis, et qui s'en servaient très bien, mais ce n'est pas l'ensemble de l'équipe enseignante. Les retours qu'on en avait, c'était que les équipes enseignantes n'étaient pas prêtes à pouvoir travailler sur ces tablettes au quotidien".
En Ardèche, le département a donc redéployé l'ensemble des tablettes sur ces 26 collèges, pour en faire profiter le plus d'élèves possible.