"Expliquez-nous": existe-t-il un racisme "anti-blanc" dans le monde du football?

Lilian Thuram en pleine tournante depuis une semaine. L’ancien défenseur des bleus a déclaré la semaine dernière à un journal italien : “Il faut avoir le courage de dire que les blancs pensent être supérieur”.
La phrase déclenche aussitôt une polémique et effectivement, telle quelle, elle est raciste, puisqu’elle prête un trait de caractère, le sentiment de supériorité à l’ensemble d’un groupe, en l'occurrence les blancs. Lilian Thuram, militant anti-raciste a ensuite eu l’occasion de s’en expliquer. Il a dit qu’il était interrogé sur les supporters italiens dans les stades qui imitent le cri des singes lorsqu’un joueur noir à la balle. Et cette phrase sur les blancs qui se croient supérieurs ne visaient pas tous les blancs de la planète, mais uniquement les supporters racistes italiens. Dont acte et fin de la première polémique.
Le débat a ensuite rebondi. Samedi le journaliste de Canal+, Pierre Ménès a déclaré: “Le vrai problème dans le foot en France, c’est le racisme anti-blancs”. Et pour l’illustrer, Pierre Ménès explique qu’il a inscrit son fils dans un club, mais qu'après deux séances, il a refusé d’y retourner parce qu’“on ne lui parlait pas, on ne lui passait pas la balle et on refusait de prendre la douche avec lui” ! Et le journaliste à préciser : "Dans ces clubs de banlieue, il n’y a pas un blanc, sauf parfois le gardien de but ou l'arrière droit".
Une forme de racisme qui existent en France
Alors j’ai cherché et je n’ai pas trouvé d’étude sur le racisme anti-blanc dans les clubs de jeunes en banlieue. Mais il se trouve que j’ai un fils qui joue au foot en banlieue tous les samedis depuis quatre ans, il est effectivement arrière droit, et blanc. Mais personne ne lui a jamais interdit de prendre sa douche avec tout le monde. J’ai parlé également dimanche à son entraîneur qui n’a jamais vu en dix ans, un petit blanc à qui on ne fait pas de passe parce qu’il est blanc. Conclusion : faute d’étude, on ne peut se fier qu'à son ressenti, et je n’ai pas le même que Pierre Ménès.
Alors est-ce qu’au-delà du Foot, est ce que l’on peut dire qu’il y a un racisme anti-blancs en France ? C'est une question controversée, mais je pense que oui, car toutes les formes de racisme existent, anti-blancs, anti-noirs, anti-gros, anti-vieux… Il y a des noirs qui n’aiment pas les blancs, des Arabes qui n’aiment pas les noirs, des Juifs ashkénaze qui détestent les juifs Séfarade…
Mais le terme de racisme anti-blancs fait surtout parti du vocabulaire de l'extrême droite. Et c’est pour cela que Jean François Copé avait été critiqué, même dans son propre camp pour l’avoir utilisé avec son histoire de pain au chocolat.
15% de blancs victimes de discrimination
Pourtant, il n’y a pas que l'extrême droite. Bernard Kouchner et l’éditorialiste de gauche Jacques Juillard, avait dénoncé ensemble un racisme anti-blancs à propos de manifestations lycéennes en 2005. Il y avait eu des violences dans les cortèges, les victimes étaient très majoritairement blanches et les agresseurs très majoritairement noirs. Il fallait être aveugle pour ne pas le voir. De même qu’il serait idiot de nier que des blancs puissent se faire traiter de “sales blancs”, dans certains quartiers.
Mais quelle est l’ampleur du phénomène ? Sur cette question, il y a des études sérieuses. Deux études de l’INED en 2008 et 2012. On demande aux membres du groupe majoritaire, c’est-à-dire les blancs, s’ils ont déjà été victimes de discriminations racistes et ils répondent oui à 15%, contre 30% à 40% pour les personnes issues de l’immigration.
15% donc de blancs qui se disent victimes de discrimination, ce n’est pas rien. Sauf que quand on regarde dans le détail, on s'aperçoit qu’arrivent en tête, les discriminations liées à l'âge, au poids, aux pratiques sexuelles ou au handicap. Pas les discriminations liées à la couleur de la peau. De même qu’aucune enquête n’a jamais indiqué que les blancs puissent être victime de discriminations à l’embauche, ou de difficultés à trouver un logement.