Mineurs isolés: "Ils sont laissés à la rue sans rien"
À Paris l'année dernière, plus de 6600 jeunes migrants se sont présentés au Demie, le Dispositif d'Évaluation des mineurs isolés étrangers, dont la gestion est déléguée à la Croix-Rouge, pour y faire reconnaître leur minorité. À l'issue de l'entretien qui dure officiellement une demi-heure, la moitié est directement déboutée, soit plus de 3.000 jeunes, jugés "manifestement majeurs". Plusieurs associations reprochent à la structure de pratiquer des refus de guichet, des évaluations expéditives au faciès. Ce que réfute la mairie de Paris. Ces jeunes se retrouvent néanmoins à la rue, ne pouvant compter que sur l'assistance de bénévoles.
"Le temps du recours ils sont laissés à la rue"
Ibrahim est arrivé à Paris il y a six semaines depuis la Guinée Conakry: "C’est un peu dur si tu n’as aucune famille". Il dit avoir 15 ans mais selon l’évaluation effectuée par la Croix rouge il est majeur: "Je suis vraiment déçu de la personne qui m’a fait passer l’entretien, il a écrit quelque chose que je n’ai pas dit". Selon la Mairie de Paris, 85% des jeunes qui se sont présentés comme mineurs l’année dernière ont été refoulés. Ibrahim a introduit un recours en justice qui prend en moyenne deux mois: "Le temps de ce recours ils sont laissés à la rue, sans rien sans un ticket de métro sans un euro en poche", assure Agathe Nadimi, qui aide ces jeunes migrants depuis deux ans.
"Il n’y a même pas une bienveillance qui serait de dire 'nous avons un doute sur ta minorité, mais dans l’hypothèse de ce doute nous allons te protéger'. On devrait prouver cette majorité et non dire immédiatement à charge que ces jeunes sont majeurs", ajoute-t-elle.
"Peut-être qu'il faut changer le processus d'évaluation"
À la mairie de Paris on dit suivre à la lettre toutes les règles d’accueil des réfugiés et de mise à l’abri des mineurs: "On a la volonté de déclarer le maximum de jeunes qui sont mineurs. Peut-être qu’il faut changer le processus d’évaluation, mais c’est encore une fois au gouvernement de donner des lignes et nous nous adapterons", explique Dominique Versini, adjointe à la mairie de Paris, en charge de l’accueil des réfugiés et de la protection de l’enfance. Selon Médecins sans frontières, plus d'un jeune sur quatre ayant demandé un recours, est déclaré mineur par les tribunaux.
Edouard Philippe le Premier ministre doit rencontrer aujourd'hui Dominique Bussereau le président de l'assemblée des départements de France, afin d'aider les départements à faire face à l'afflux de mineurs isolés. La prudence est pour l'instant de mise à Matignon, où l'on souligne que si le sujet sera bien discuté (...), il est trop tôt pour dire si ce sera conclusif ou pas". La France à accueilli plus de 50.000 jeunes se disant mineurs non accompagnés en 2017. Un chiffre qui ne cesse d'augmenter.