Parents isolés: à quoi ressemblerait la "carte monofamille" proposée par un rapport du Sénat?

Quarante-deux solutions pour aider et "sortir de l'invisibilité" administrative les personnes qui élèvent seules leurs enfants. Un rapport sénatorial publié ce lundi propose un arsenal de mesures en faveur des familles monoparentales, notamment une "carte monofamille" qui permettrait une reconnaissance de leur "statut" et qui pourrait leur ouvrir des droits spécifiques.
Cette "carte dématérialisée" permettrait une reconnaissance spécifique vis à vis des collectivités locales ou des "entités publiques ou privées", comme des entreprises, qui pourraient leur accorder des "prestations": logement, tarifs spécifiques.
"Aujourd'hui, ces 2.3 millions de familles n'ont pas de statut particulier", rappelle dans Charles Matin ce mardi sur RMC le sénateur des Hauts-de-Seine Xavier Iacovelli (Renaissance), co-auteur de ce rapport.
"Cette carte permettrait de les identifier et leur donner accès à des prestations, c'est le même principe que la carte famille nombreuse", simplifie-t-il.
Des simplifications notamment concernant le logement social: alors que c'est impossible aujourd'hui, cette carte permettrait aux couples séparés d'au moins pouvoir déposer une demande de logement social. "Il faut qu'ensuite, il y ait un travail avec les bailleurs sociaux et les collectivités pour qu'il y ait une priorisation pour ces familles", précise Xavier Iacovelli.
Alors qu'une famille sur quatre en France est monoparentale, pour 3,1 millions d'enfants mineurs, et compte à sa tête une femme dans 82 % des cas, cette reconnaissance pourrait aussi permettre des aménagements concernant la garde des enfants, un point de complication majeur lié à cette situation.
"L'idée, c'est qu'avec cette carte, cette reconnaissance du statut de famille monoparentale, on puisse avoir des horaires aménagés, des formations qui s'adaptent au temps des familles qui est forcément plus contraint quand on n'a qu'un seul parent", explique Xavier Iacovelli.
Le "moment-clé" de la séparation mieux accompagné par les textes législatifs?
Le rapport préconise aussi d'"accompagner les familles au moment clé de la séparation pour garantir la coparentalité dans le durée". A ce moment clé, seraient affirmés "les droits et devoirs de chacun des parents" en termes de "contribution financière", "droits et devoirs d'accompagnement de l'enfant" et d'"association des deux parents au parcours éducatif de l'enfant".
En cas de séparation des parents, la "garde alternée" devrait être envisagée "avant toute autre solution", un principe qui devrait être inscrit "dans les textes", a indiqué le sénateur lors d'une conférence de presse. Ce mode de garde pourrait être écarté en cas d'"accord consensuel des deux parents", d'éloignement géographique ou d'actes de violences sur le conjoint ou l'enfant.
Obliger le versement d'une pension
La mission préconise que le "parent non gardien" contribue aux frais d'éducation de l'enfant, quels que soient ses revenus, et de "prévoir que même les parents modestes et titulaires de minima sociaux soient mis à contribution". Actuellement, certains parents sont jugés "hors d'état" de payer ou insolvables et ne contribuent pas à l'entretien de l'enfant. Le rapport propose un "barème unique et opposable", "minimal", pour déterminer les pensions alimentaires.
"Cela permettrait de protéger le parent qui a la garde de l'enfant", souligne Xavier Iacovelli sur RMC.
Ce barème devrait prendre en compte les revenus du parent mais aussi s'ajuster aux "besoins réels de l'enfant", selon le sénateur. Actuellement, les pensions sont fixées selon les revenus du parent non gardien. Le parent qui a la garde principale de l'enfant et assume ses besoins réels, la mère en général, "perd 25% de son pouvoir d'achat en cas de séparation", souligne Xavier Iacovelli. "Il faut que le niveau de vie pour l'enfant ne change pas, ou a minima, qu'il puisse garder son périscolaire, ses activités", souligne-t-il.
Ce rapport a-t-il du plomb dans l'aile à cause du nouveau gouvernement?
Ce rapport a été commandé par l'ancienne équipe gouvernementale, et l'évolution du paysage politique depuis pourrait compliquer la poursuite de ces projets législatifs.
"Gabriel Attal était très demandeur de ce rapport", explique le sénateur Renaissance. "On compte, avec lui en tant que président de groupe, porter un certain nombre de sujets législatifs concernant ce rapport", poursuit-il, avant une rencontre dès mercredi avec la ministre des Familles et de l'Enfance pour présenter ces recommandations. Un rendez-vous qu'il aborde sans pessimisme, mais sans optimisme non plus, conscient que la situation reste compliquée.
"On verra le discours de politique générale", concède-t-il, espérant "la réussite" de ce gouvernement.