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"Plaquage" sur le chantier de l'église de Saint-Pierre-de Colombier: les raisons de la discorde

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A Saint-Pierre-de-Colombier (Ardèche), un conflit dure entre d'un côté les sœurs de la Communauté de la famille missionnaire de Notre Dame et de l'autre des associations de riverains. Au point qu'une religieuse a "plaqué" un miltant sur le chantier.

La vidéo est devenue virale sur les réseaux sociaux et dépasse les quatre millions et demi de vues. Ce sont des images filmées par France3 où on voit une religieuse plaquer au sol un militant écologiste dans un champ. Les habitants de Saint-Pierre-de-Colombier se déchirent autour de la construction d'une gigantesque église lancée à l'initiative d'une communauté locale.

Un conflit qui dure depuis quatre ans

Le conflit perdure depuis quatre ans. Depuis que cette communauté traditionaliste a lancé un vaste projet d'agrandissement de son site religieux.

Les militants écologistes n'en veulent pas. Ils sont une quarantaine sur place pour empêcher le chantier. Jeudi dernier, ils se sont même attachés à une pelleteuse.

Ce conflit dure depuis des années. D’un côté, des écologistes du collectif Les Amis de la Bourges, de l’autre, des religieuses de la communauté de La famille missionnaire de Notre-Dame.

Les premiers estiment que la construction de cette église, qui doit pouvoir accueillir 3.500 fidèles, présente un danger pour l’environnement, comme l’assure l’Office français de la biodiversité (OFB).

Un chantier colossal au cœur du litige

C'est un projet colossal. Il s'agit de faire sortir de terre un nouveau bâtiment d'accueil pour les pèlerins et une nouvelle basilique pouvant abriter jusqu'à 3.500 fidèles, sous deux clochers de 50 mètres. Le budget total du chantier est estimé à 17 millions d'euros.

Une folie des grandeurs qui ne passe pas dans le secteur, avec des élus et des habitants qui depuis le début trouvent tout cela démesuré et craignent à la fois l’arrivée massive de pèlerins mais aussi les dégâts sur l’environnement.

En 2020, une ZAD a même commencé à être installée par militants écologistes. Le chantier a dû être arrêté, pendant deux ans, le temps de nouvelles études d’impact et de recours en justice, qui n’ont pas abouti.

Ce qui explique l'autorisation de la reprise mais les opposants ne lâchent pas. Ils pointent maintenant le risque pour la préservation d'une plante protégée : le réséda de Jacquin. Une nouvelle plainte a été déposée.

La préfète va recevoir aujourd’hui les deux camps mais de manière séparée. Car il reste impossible de mettre tout le monde autour de la table.

Une communauté religieuse dans le viseur du Vatican et de la Miviludes

Il y a quand même des interrogations sur cette communauté religieuse. La Famille missionnaire de Notre-Dame, qui est installée dans cette commune d’Ardèche depuis 1946.

C'est une communauté catholique traditionaliste qui propose des activités aux enfants et aux adolescents, des pèlerinages, des camps d’été et qui effectivement pose question.

Elle est dans le viseur du Vatican parce qu’elle ne suit pas la ligne. D’ailleurs, l'évêque local n’a absolument pas validé le projet de basilique.

Elle fait l’objet de signalements auprès de la Miviludes (mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires), qui a été saisie et qui évoque dans son rapport de 2018-2020 trois témoignages.

On parle du recrutement de personnes jeunes, malléables, manquant de maturité et qui se retrouvent coupées de tout contact avec l’extérieur, y compris avec leur famille. Les sorties ne sont pas autorisées, aucune correspondance ni appels ne peuvent être passés.

Les témoins parlent aussi de difficultés d’accès aux soins de manipulation des membres lors des confessions et d’une forme de culte de la personnalité envers le prêtre qui dirige la communauté.

Enfin, ces témoignages font état d’un harcèlement financier opéré par les membres pour obtenir de l’argent. Il faut par exemple léguer ses biens avant d’intégrer définitivement cette congrégation.

Sébastien Krebs