60.000 nouveaux cas de cancers du sein par an: "Ils sont liés pour moitié aux nouveaux modes de vie"

Les cancers chez les femmes explosent. Selon un rapport très riche d'enseignements sur l'évolution des cas de cancers depuis près de 30 ans dévoilé par Santé Publique France, l'écart entre les hommes, plus touchés normalement par le cancer, et les femmes se réduit.
Ainsi, en 2018, on estime à 382.000 le nombre de nouveaux cas de cancers en métropole (204.583 chez l'homme, 177.400 chez la femme) et à 157.400, le nombre de décès par cancer (89.621 chez l'homme, 67.800 chez la femme), selon l'agence sanitaire. Mais l'incidence (nouveaux cas), tous cancers confondus, est stable chez l'homme (+0,1 % par an) alors qu'elle s'accroît chez la femme (+1,1% par an).
Les femmes "payent" aujourd'hui leur tabagisme des années 80: en terme de taux, "l'incidence (+5,3 % par an) et la mortalité (+3,5 % par an) du cancer du poumon enregistre la plus forte progression chez la femme". C'est l'évolution "la plus préoccupante", compte tenu du "pronostic sombre" de ce cancer.
"Les femmes se sont beaucoup mises à fumer dans les années 1980-1990 car c'était aussi un objet d'émancipation à l'époque" décrypte Anne Gallay, directrice à Santé Publique France.
"12.000 femmes qui meurent d'un cancer chaque année"
Invitée de RMC, Suzette Delaloge, oncologue, chef du département du cancer du sein à Gustave Roussy, partage cette analyse:
"Il y a une forme d'épidémie des cancers liée, pour moitié, au vieillissement de la population, dans les cancers du sein en particulier. Mais pour l'autre moitié, c'est lié à une certain nombre de changements de modes de vie en général. Le fait d'avoir des enfants plus tard, moins d'allaitements, que les imprégnations hormonales sont plus longues, différentes, qu'on ait des modes de vie très sédentarisés, un taux de surpoids plus important... (...) On ne peut pas mettre ensemble tous les cancers: certains sont évitables, comme le cancer du poumon qui augmente dramatiquement, d'autres beaucoup moins".
"Si les traitements sont efficaces, malheureusement, on compte plus de 12.000 femmes qui meurent d'un cancer chaque année. C'est énorme et c'est difficilement acceptable. Même si on ne meurt pas d'un cancer du sein, cela reste très grave. Ca change votre vie à long terme avec des séquelles potentielles" souffle la spécialiste à Jean-Jacques Bourdin.
"Il y a un certain nombre de facteurs modifiables. On peut faire des choses. Mais certains n'ont pas encore été identifiés en terme de polluants, d'environnements, de perturbateurs endocriniens" précise-t-elle.
"On peut épargner globalement 7.500 vies par an"
Pour Sébastien Couraud, pneumologue aux Hospices civils de Lyon, il est aujourd'hui important de faire de la prévention anti-tabac, mais surtout de mieux dépister. Notamment en visant les femmes de 50 à 74 ans qui ont fumé plus de 25 ans.
"Lorsqu'on diagnostique un cancer du poumon à un stade très précoce, on a 80% de chances que le patient soit en vie dix ans plus tard. On pourrait donc épargner globalement 7.500 vies par an" annonce le spécialiste.
Un cancer des poumons, qui pourrait devenir à l'avenir, la première cause de décès par cancer chez les femmes, en doublant le cancer du sein. Ce dernier reste à date le cancer le plus fréquent et le plus mortel chez les femmes, avec près de 59.000 nouveaux cas et un peu plus de 12.000 décès annuels.