"C'est ridicule": des pharmaciens en colère contre la vente d'antibiotiques à l'unité

Pour limiter les pénuries, le gouvernement va rendre obligatoire la vente à l'unité de certains antibiotiques, confrontés à des tensions d'approvisionnement. "Il n'y a pas de rationnement, l'idée, c'est de rendre obligatoire la distribution de médicaments à l'unité quand il y a tension", a indiqué mercredi une source proche du dossier à l'AFP, évoquant également l'intérêt de "lutter contre l'antibiorésistance".
La vente à l'unité pourrait contribuer à réduire le gaspillage d'antibiotiques et éviter les pénuries en délivrant le nombre exact de comprimés prescrits, alors que la France est l'un des plus gros consommateurs d'Europe.
"Il n'y a pas de gâchis"
Une décision qui fâche les pharmaciens: "C'est difficile de basculer dans l'urgence pour s'organiser pour délivrer à l'unité", peste Bruno Fellous, pharmacien à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) dans "Apolline Matin" ce jeudi sur RMC et RMC Story. "Les laboratoires nous livrent les médicaments dans des boîtes correspondant aux traitements, selon les prescriptions. Théoriquement, il n'y a pas de gâchis", explique le professionnel.
"C'est toujours fait dans l'urgence et on doit s'adapter. On refile la patate chaude aux pharmaciens, comme d'habitude, et on doit se débrouiller. C'est ridicule", s'agace Bruno Fellous.
La traçabilité à l'épreuve
Et avec une distribution à l'unité, le pharmacien craint de perdre les données de traçabilité des médicaments ainsi que la notice d'utilisation à destination des usagers.
Mais ne serait-ce pas aussi une question d'argent? "Nous sommes remboursés au prix de la boîte d'antibiotiques et en donnant moins, nos remboursements seront divisés par deux. Mais depuis des années, on nous enlève des tarifications et on s'est adaptés. On fait de la santé publique. Aujourd'hui, la seule question, c'est la traçabilité", élude Bruno Fellous.
Les pénuries sont pourtant bien réelles. Après la pénurie d'amoxicilline l'hiver dernier, les pharmacies sont confrontées à un manque de crèmes antibiotiques, de cortisone notamment. "Les laboratoires vont peut-être arrêter de les fabriquer parce que les coûts de fabrication de ces médicaments sont trop élevés. Quand l'Etat français achète moins cher que le coût de fabrication, quel intérêt pour un labo de lui en vendre?", s'interroge le pharmacien.
Conséquence directe, les pays comme l'Allemagne ou l'Espagne, qui achètent plus cher, ne sont pas confrontés aux pénuries. En France malgré, les promesses, rien n'a visiblement changé pour l'instant d'après Bruno Fellous.