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Faut-il craindre le variant indien en France? "Il faut un effort massif de séquençage", réclame le Pr Philippe Froguel sur RMC

DOCUMENT RMC - Malgré l'amélioration de la situation sanitaire, il faut rester vigilant face au variant indien alors que la France ne séquence pas assez, empêchant de détecter les possibles cas.

La situation sanitaire continue de s’améliorer en France alors que la barre des 20 millions de primo-vaccinés a été franchie samedi. Mais la menace des variants et notamment le variant indien qui fait de gros dégâts en Inde, plane sur le déconfinement qui doit amorcer un virage majeur ce mercredi avec la réouverture des terrasses et le recul du couvre-feu.

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"Il faut s'inquiéter du variant indien", prévient ce lundi sur RMC le professeur Philippe Froguel, diabétologue et généticien au CHU de Lille et à l’Imperial College de Londres. En Angleterre, 50% des cas sont des cas de variants indien et le gouvernement est très inquiet". En France pour l'instant, le variant indien concerne 24 cas seulement. Un chiffre qui pourrait être tout à fait sous-estimé, juge le praticien.

"On le cherche très peu, on ne séquence pas assez, on le fait 10 fois moins qu'en Angleterre. Nous n'avons pas mis en place un test de triage PCR qui reconnaît spécifiquement ce variant, on est à l'aveugle. Sur ces 24 cas il y a 22 personnes qui revenaient d'Inde et deux autres cas qui n'ont rien à voir avec l'Inde, ce qui est extrêmement inquiétant", assure Philippe Froguel.

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"Il y a un manque de courage vis-à-vis des lobbies"

Car ces deux cas isolés, signifieraient que de nombreux cas n'ont pas été détectés et que le variant, pour arriver jusqu'à ces deux personnes, serait passé par d'autres cas non identifiés.

"J'invite Monsieur Véran et le président de la République à faire ce qu'ils ont dit qu'ils feraient depuis trois mois, c'est à dire un effort massif de séquençage en associant le secteur privé prêt à le faire et les centres de génomique. On peut faire aussi bien que les autres pays en deux semaines et savoir région par région s'il y a des porteurs de variant indien".

L'association du secteur privé dans l'effort de lutte contre l'épidémie de Covid-19 est pourtant demandée depuis le début de la crise: "Il y a un manque de courage vis-à-vis des lobbies et des particularismes universitaires. Les quatre centres de références et les virologues français n'ont pas du tout envie que le secteur privé des généticiens les aident à faire le boulot.

"On est totalement aveugle, on fait l'autruche, il faut déconfiner en gardant les yeux ouverts", avertit Philippe Froguel.

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Déconfinement retardé en Grande-Bretagne?

En plein déconfinement, le variant indien inquiète... aussi en Angleterre. Le pays doit effectuer ce lundi un nouveau pas dans son déconfinement avec le retour du service en salles dans les pubs et restaurants, la réouverture des lieux culturels et la reprise des voyages à l'étranger. Or, le nombre de cas attribués a ce variant dans le pays a plus que doublé en une semaine, grimpant à 1.313 la semaine dernière. Des cas concentrés surtout dans le nord-ouest du pays et à Londres. 

Et le gouvernement britannique a d'ores et déjà prévenu: la circulation de plus en plus forte du variant indien pourrait remettre en question le rythme du déconfinement.

"À ce stade, cette augmentation de cas ne met pas notre système de santé en difficulté... Donc je ne pense pas que nous ayons besoin de retarder notre feuille de route, mais il est vrai que cette nouveau variant pourrait perturber gravement notre déconfinement et rendre plus difficile le passage à la quatrième étape en juin" a indiqué le Premier ministre Boris Johnson. 

Le dépistage va ainsi être renforcé dans les zones touchées et la durée entre les deux doses du vaccin réduite pour les personnes les plus vulnérables. Objectif: tenter de maitriser le développement de ce virus dont les scientifiques ne connaissent pas encore beaucoup de détails. La levée de presque toutes les restrictions y est prévue le 21 juin, pour le moment.

Guillaume Dussourt