Malformations de leur fils: la famille Grataloup perd son procès contre Bayer par manque de factures

La justice ne reconnaît pas la responsabilité de Bayer-Monsanto dans les graves malformations de Théo Grataloup. Le géant de l'agrochimie Monsanto, depuis racheté Bayer, a été exempté de toute responsabilité dans une jugement rendu jeudi par le tribunal de Vienne (Isère).
Le groupe était poursuivi par cette famille qui l'accuse d'être responsable des graves malformations de leur fils Théo. En 2006, sa maman avait aspergé de glyphosate ses mauvaises herbes alors qu'elle était enceinte mais qu'elle l'ignorait à ce moment-là.
Mais la justice a notamment estimé que les preuves ne sont pas suffisantes pour démontrer l'achat et l'utilisation du produit. "C'est bien sûr une déception", a réagi dans un communiqué la famille Grataloup, qui a annoncé son intention de faire appel.
"En mode combat"
Car l'argument des preuves d'achats est absurde dénonce la mère de Théo, Sabine Grataloup sur RMC: "Ce qui a fait basculer de l'autre côté, ce sont des détails. Il est essentiel que le niveau de preuves demandées soit ajusté à la réalité".
"Une famille ne va pas garder la facture de tous les documents qu'elle utilise et se prendre en photo dès qu'elle manipule un produit en se disant que si ça cause un cancer il va falloir le prouver. Maintenant, on est en mode combat", assure-t-elle.
La famille avait pourtant apporté des photos, deux anciennes employées du centre équestre ont témoigné avoir vu Sabine y utiliser, pendant plusieurs jours, un désherbant total. "Mais aucune d’elles ne mentionne précisément que le produit utilisé était du Glyper", écrit le tribunal.
Sans ticket de caisse, sans preuve d’achat, inutile d’aller plus loin et d’analyser les conséquences de l’exposition aux pesticides sur le fœtus ? si l’exposition elle-même n’est pas prouvée.
Nombreuses malformations
Né en 2007 avec de graves malformations au larynx et à l'œsophage, Théo Grataloup a subi au total depuis sa naissance, 55 opérations. Le jeune homme vit avec une trachéotomie. Il respire grâce à un trou dans sa trachée. Il n'a pas de corde vocale. Mais il arrive à s'exprimer malgré tout.
Les médecins assurent alors à ses parents qu'aucun facteur génétique ou comportemental n’explique ces malformations.
Sabine Grataloup cherche alors et finit par retrouver dans sa remise un désherbant, le Glyper, qu’elle a utilisé en 2006, pour entretenir son centre d’équitation. Elle ne savait pas encore qu’elle était enceinte.
Or, les premières semaines de la grossesse sont les plus importantes pour le développement du foetus. Sabine et son mari Thomas sont persuadés que le Glyper, et le glyphosate qu’il contient, est responsable des malformations de leur fils.
Bayer assure veiller à la "non-dangerosité" de ses produits
Bayer a exprimé "toute sa compassion à la famille Grataloup". Et le groupe a tenu "à rappeler que ses produits sont commercialisés dans le strict respect des réglementations" qu’il veille à leur "non-dangerosité".
Mais celle-ci fait débat: le glyphosate, herbicide le plus vendu au monde, (800.000 tonnes en 2014), est classé en 2015 comme un "cancérogène probable" par le Centre international de recherche sur le cancer de l'OMS.
Depuis fin 2018, le produit est interdit en France pour un usage domestique. Mais en 2023, l’autorisation de commercialisation est renouvelée par l’Europe ! pour des usages agricoles.
Un an avant, en 2022 des médecins et chercheurs ont tout de même reconnu "la possibilité" d’un lien entre les malformations de Théo et son exposition aux pesticides avant sa naissance. Le "Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides" lui verse donc depuis 1000 par mois jusqu’à ses 20 ans.