RMC

Vaccin anti-Covid-19: ces pays qui plébiscitent AstraZeneca

Des doses du vaccin AstraZeneca

Des doses du vaccin AstraZeneca - AFP

EXPLIQUEZ-NOUS - Tous les matins à 7h50, Nicolas Poincaré propose sur RMC une chronique pédagogique mais personnelle sur une actualité du jour.

Le mal-aimé. Cette semaine, encore, deux nouveaux pays ont décidé de suspendre la vaccination avec AstraZeneca: il s'agit de la Slovaquie et du Brésil, mais uniquement pour les femmes enceintes. Le sérum est suspendu également dans l'Ontario, province canadienne la plus peuplée.

Une défiance à l'égard de ce vaccin jusqu'ici, rien d'étonnant. Pourtant, plus surprenant, dans certains pays, AstraZeneca fait un carton. 

A commencer par le Royaume-Uni: AstraZeneca y représente les deux tiers des vaccinations avec plus de 28 millions de doses injectées au total. Forcément, puisque c'est le vaccin national, la fierté locale. Le vaccin a été mis au point par les chercheurs de l'université britannique d'Oxford. Injecté dès la fin décembre à une population particulièrement endeuillée par l'épidémie, c'est ce qui a permis de vider les hôpitaux saturés.

Le sérum y fait l'unanimité politique et médicale: les rares cas de thromboses ne trouvent pas d'échos dans la presse nationale, et les rares proches de personnes décédées de thromboses qui ont pris la parole dans les médias ont même continué à recommander ce vaccin. 

Plus surprenant: l'Allemagne. C'est même un véritable retour en grâce...

Souvenez-vous, les Allemands avaient été parmi les premiers à suspendre le vaccin quelques jours à la mi-mars avant de l'injecter uniquement aux plus de 60 ans... mais depuis, la semaine dernière, changement de cap. L'Allemagne l'autorise pour tous les adultes quel que soit leur âge... et on a vu ce week-end des images assez impressionnantes de personnes venues de très loin avec leur camping-car ou leurs chaises pliantes pour pouvoir être vaccinées avec AstraZeneca. A Berlin, il y a même une pénurie de doses. 

Deux explications: d'abord, le revirement du gouvernement qui mise désormais sur ce vaccin pour accélérer le rythme et atteindre au plus vite l'immunité collective.

Il y a aussi l'envie des allemands de retrouver au plus vite la liberté en se vaccinant: l'Allemagne a levé la semaine dernière les restrictions pour les personnes vaccinées. Ces dernières peuvent notamment se rendre dans les commerces non-essentiels et ne sont plus soumises au couvre-feu...

Pourquoi l'Europe avance-t-elle en ordre dispersé?

Parce qu'il n'y a pas de règle claire et imposée aux Etats. L'agence européenne des médicaments a beau affirmer qu'AstraZeneca est un vaccin sûr et efficace, que les bénéfices sont supérieurs aux risques, il ne s'agit en réalité que de recommandations.

Chaque pays européen fixe ainsi ses propres critères d'âge pour vacciner. Et c'est la grande confusion: plus de 40 ans en Belgique, plus de 55 ans, en France, plus de 60 ans au Portugal et en Italie, entre 60 et 69 ans en Espagne...Et même plus de 70 ans en Islande, pays hors UE. 

Quand certains pays européens ont même carrément décidé de s'en passer, comme le Danemark, qui ne déplore que deux cas de thromboses grave dont un mortel, mais qui a abandonné définitivement ce vaccin. Cela va ainsi rallonger de trois semaines le programme d'immunisation danois. Mais le pays peut se le permettre: la majorité de la population à risque est vaccinée, l'épidémie est sous contrôle. La Norvège qui a suspendu AstraZeneca depuis la mi-mars et devrait lui emboîter le pas prochainement.

Mais alors que faire des vaccins restants? Quelques 200.000 doses dorment dans des frigos danois. "Nous voulons qu'elles soient utilisées" affirment les autorités. Une solution vient d'apparaître: les donner à des pays pauvres. 

Mais les refiler alors qu'on juge le vaccin pas assez sûr pour sa propre population, voici qui risque d'ouvrir quelques procès en moralité. 

Anne-Sophie Balbir avec Xavier Allain