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Cap des 100.000 bornes de recharge pour voiture électrique: leur fiabilité fait encore débat

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Si la France continue de déployer à un rythme effrené ses bornes de recharge pour voitures électriques, de nombreux problèmes, notamment de fiabilité, sont recensés par les spécialistes et les automobilistes.

Enfin. Avec un an et demi de retard, le cap des 100.000 bornes de recharge pour les voitures fonctionnant à l’électricité a été atteint dans l’Hexagone. Si ce chiffre symbolique permet à la France de devenir le deuxième pays le mieux équipé d'Europe, derrière les Pays-Bas et juste devant l'Allemagne, la réussite de ce déploiement est toutefois à nuancer sur de multiples points.

À commencer, évidemment, par la fiabilité et la disponibilité de ces bornes de rechargement. Car pour certains automobilites ayant fait le choix d’opter pour le 100% électrique, il s’avère parfois compliqué de trouver des bornes qui fonctionnent correctement.

Au 32 16, Patrice, un chauffeur VTC francilien, s’est invité dans le débat afin de partager son retour d’expérience. Acheté en début d’année 2022, son van Mercedes 100% électrique lui sert tous les jours pour son travail. En milieu urbain, Patrice est pleinement satisfait de l’autonomie de son véhicule.

“Au bout d’un an et demi, en ville c’est génial. Des collègues à moi mettent 120€ d’essence dans leur van pour faire 700km, moi je mets 30€ pour la même distance”, explique-t-il.

"J’arrive à Beaune ric-rac avec 10% de batterie… et borne en panne!"

Toutefois, questionné par Charles Magnien sur des trajets de plus longue distance, Patrice a fait part de sa difficile expérience endurée à l’été 2022. “C’est là où le bât blesse. L’année dernière on est descendu sur la Côte d’Azur, et on s’est dit qu’on allait prendre le van car c’est vachement sympa. Entre Paris et Lyon, il n'y avait que deux points d’arrêt. (...) Non seulement il ne faut pas louper la sortie, mais il faut surtout que les bornes fonctionnent”, raconte le chauffeur VTC.

Assurant qu’il n’a que “200km d’autonomie (sur autoroute), au lieu de 350 en ville”, Patrice s’est donc arrêté au premier point d’arrêt. “Je m’arrête, première borne en panne, il faut aller jusqu’à Beaune. Donc, pour y arriver, sur l’autoroute, je roulais à 90/100 km/h pour économiser l’électricité”, poursuit le francilien.

“J’arrive à Beaune ric-rac avec 10% de batterie… borne en panne! Obligé d’appeler Mercedes pour qu’ils me passent de l’autre ccôté de l’autoroute pour que je me branche sur une borne qui fonctionnait. On a perdu 2h au moins”, déplore alors Patrice, le chauffeur de VTC.

"Sur les 100.000 bornes, seulement 6% sont de charge rapide"

Son récit est loin d’être anodin, et encore plus loin d’être unique en son genre. David, un auditeur de l’émission Apolline Matin, a lui aussi fait les frais de bornes de rechargement en panne. Lors de l’achat de son véhicule électrique, il y a trois ans de cela, il raconte avoir mis 13h pour effectuer 500km, faute de bornes de charge rapide disponibles. Actuellement, la France compte environ 10% de point de charge rapide. A titre de comparaison, l'Allemagne est à environ 18%.

Selon François-Xavier Piétri, journaliste automobile invité d’Apolline Matin sur RMC et RMC Story, la décision politique de mettre l’accent sur le 100% électrique est “un choix arbitraire, un choix délirant, car la France n'est pas prête. Sur les 100.000 bornes, seulement 6% sont de charge rapide".

Une question de prix

Au-delà de la problématique du temps de recharge, le souci de la voiture électrique est aussi économique, et ce à différentes échelles.

"Le problème, c'est que la voiture électrique est un "sport de riches" avec des prix délirants. Pour une Renault Zoé, c'est 32.000€ en entrée de gamme. Le prix moyen d'une voiture eléctrique est de 46.000€, presque le double d'une voiture thermique", explique François-Xavier Piétri. Et “même avec les bonus (mis en place par l’Etat), qui ne seront pas infinis, l'écart est très important".

En parallèle, aux yeux du journaliste et auteur du livre Voiture électrique : ils sont devenus fous!, une "casse sociale gigantesque se prépare” à cause de la voiture électrique, cette-fois ci sur le thème de l’emploi. En effet, selon lui, “pour construire une voiture électrique il faut trois ouvriers (contre 60 pour une thermique)”. De plus, l’entretien d’une voiture électrique est “moins important”, ce qui signifie que “les garages voient donc moins de clients".

Enfin, sur la question des bornes de recharge, François-Xavier Piétri est, là aussi, assez critique envers ces bornes en libre service. "Qu'on arrête de nous dire que l'électrique coûte moins cher, sauf si on a une recharge chez soi. Dès qu'on veut recharger en extérieur, on rentre dans des galères absolues", assure-t-il.

Malgré ces “galères” énoncées par François-Xavier Piétri et par les auditeurs de RMC, le gouvernement ne compte pas ralentir la cadence. Pour Emmanuel Macron, l’objectif est toujours le même : mettre à disposition 400.000 bornes de recharge en libre-service d’ici à 2030.

Alexis Lalemant, avec Estelle Henry