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Carburants: une ristourne de Total sur le gazole risquerait-elle de déséquilibrer le marché?

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Mardi à Rungis (Val-de-Marne), Emmanuel Macron a demandé qu’un nouveau geste soit réalisé sur les prix des carburants et notamment celui du gazole. Mais, si cette ristourne était réalisée seulement par TotalEnergies, un déséquilibre commercial pourrait alors voir le jour…

Au marché international de Rungis mardi matin, le président de la République a profité de sa première sortie en public, depuis la présentation du projet de réforme des retraites, pour revenir sur la question des prix des carburants en France. Alors que le prix du gazole stagne autour des 1,85€ par litre depuis quelques semaines désormais, à un prix très légèrement inférieur que le Sans-plomb 95-E10, Emmanuel Macron a expliqué vouloir un nouveau “geste” sur le prix du carburant pour moteur Diesel. 

“Je souhaite que le dialogue puisse se finaliser entre le ministère et les entreprises concernées, comme ça avait été fait l'année dernière sur les carburants avec des ristournes à la pompe qui avaient été faites par les entreprises comme Total. [...] C'est important, dans une période où on a besoin d'accompagner nos compatriotes, en particulier ceux qui travaillent”, a lancé le chef de l’État. “Vous allez voir”, a-t-il même lancé. 

Si peu d’informations supplémentaires ont filtré sur la nature du possible geste, qui pourrait être seulement orchestré par TotalEnergies, l'éventualité d’une ristourne ne peut que satisfaire les automobilistes, contraints de payer leur carburant à un prix très élevé depuis près d’un an.

“C’est quasiment le prix d’un loyer à la fin du mois. L'État s’en met plein les poches avec les taxes, Total s’en met plein les poches aussi, donc les deux doivent faire un effort car c’est le contribuable qui paye l’addition quoi”, peste cet automobiliste rencontré dans une station-service. 

Jonathan, un auditeur héraultais de RMC et chef d’entreprise dans les travaux publics, affirme de son côté dépenser en gazole “plus de 1000€ par mois, avec un seul véhicule”.  S’il affirme faire des efforts pour moins consommer, comme de rouler plus lentement sur autoroute, Jonathan explique ne pas pouvoir faire plus actuellement pour faire des économies. 

Les petites stations en péril?

Du côté de l’analyse de la situation actuelle, Francis Pousse, président de la branche stations-service et énergies nouvelles chez Mobilians, estime qu’il serait plus judiciable de baisser les taxes imposées par l’Etat sur les carburants “puisque là au moins vous êtes sûrs de retrouver dans toutes les stations une baisse du prix à la pompe”. 

Gérant d’une station-service, Francis Pousse estime que si l’exécutif n’opte pas pour une réduction de sa taxe sur le carburant, ce qui semble se dessiner, “il faudrait dans ce cas là que l’ensemble des distributeurs et des pétroliers puissent jouer à armes égales, et puissent aussi donner une remise à peu près similaire partout”. 

Le risque, selon lui, en passant par une ristourne qui serait à l’initiative des distributeurs de carburants, serait de déstabiliser le marché, car TotalEnergies serait probablement le seul à proposer cette réduction de prix éphémère sur ses carburants. 

“Il n’y a plus qu’un pétrolier français. Les autres, européens ou mondiaux, n’ont pas vraiment d'intérêt à mettre en place une remise supplémentaire puisqu’ils ne sont pas taxés en France”, explique Francis Pousse, président de la branche stations-service et énergies nouvelles chez Mobilians.  

Dans ce cas, ce sont donc les stations-service n’étant pas sous l’égide de TotalEnergies, et donc notamment les points de vente indépendants de carburants, qui subirait une nouvelle baisse de leur fréquentation à cause de prix proposés inévitablement plus élevés.

Lors des ristournes les plus fortes proposées par le groupe TotalEnergies, au second semestre 2022, “des stations qui n’étaient pas sous le pavillon national (de Total) ont subi une baisse des ventes d’entre - 20 et - 40%. A un moment où on essaye de sauver les stations-service…”, regrette Francis Pousse. 

Néanmoins, le président de la branche stations-service et énergies nouvelles chez Mobilians, ne souhaite pas s’emballer. À la question de savoir s’il comptait se lancer dans des recours pour éviter que TotalEnergies ne soit le seul distributeur à proposer une ristourne, qui favoriserait donc l’achalandage dans ses points de vente, Francis Pousse préfère temporiser, expliquant qu’on “ne sait pas ce qu’il va passer. On ne sait pas de quelle ampleur serait cette éventuelle remise. Donc pour l’instant, wait and see”. Réponse, donc, dans les prochains jours.

Alexis Lalemant