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La polémique après le bénéfice record de TotalEnergies est-elle justifiée?

Le groupe pétrolier français TotalEnergies a annoncé mercredi avoir engrangé le plus important bénéfice de son histoire. Un record qui fait polémique au vu de la situation économique actuelle en France et dans le monde.

Dégoût ou fierté? L'annonce du bénéfice record de TotalEnergies interpelle, alors que les Français subissent depuis plusieurs mois et même plusieurs années des moments difficiles au moment de payer leur plein d'essence.

Le géant pétrolier français a dégagé le bénéfice le plus important de son histoire, grâce à l'envolée des cours du gaz et du pétrole dans le sillage de la guerre en Ukraine, ravivant les appels à taxer davantage les "superprofits" et à arrêter l'exploitation d'hydrocarbures. Le bénéfice net annuel -au niveau mondial- annoncé est de 20,5 milliards de dollars, son record absolu après ses 16 milliards de 2021.

Plusieurs personnalités politiques sont montées au créneau après ces annonces, comme le député de la Somme François Ruffin, outré que Total ne paie que peu d'impôts en France. Dans la nuit de mardi à mercredi, des militants du collectif StopTOTAL ont également collé des affiches dans plusieurs villes de France pour dénoncer des "profits illégitimes".

Contrairement au Royaume-Uni, le gouvernement français continue d'écarter l'idée d'une taxation des "superprofits", se contentant de la "contribution temporaire de solidarité" décidée par l'Union européenne. En France, le groupe a fait valoir qu'il paiera 200 millions d'euros d'impôt sur les sociétés.

"Il faut désamorcer ces profits et relativiser", juge Francis Duseux, expert pétrolier, invité d'"Apolline Matin" sur RMC qui met en perspective ces profits annuels: "C'est ce que gagne Apple en un trimestre", compare-t-il.

"Total tourne bien grâce aux petits comme nous qui sommes obligés d'aller faire le plein chez eux"

Reste que dans les stations-service, l'incompréhension est de mise chez les automobilistes que nous avons croisé dans les Yvelines. Yohann, commercial, est "dégoûté". "Les gens ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts pendant qu'ils engrangent des milliards", note-t-il.

"C'est incroyable de ne pas partager avec le pays pour aider le pays à avancer", se scandalise Yohann.

Auditeur RMC venant de Marseille et artisan, Pierre rappelle également que c'est grâce aux millions de Français qui font rouler leurs voitures.

"Total tourne bien grâce aux petits comme nous qui sommes obligés d'aller faire le plein chez eux", selon-lui. "Ces 350 millions d'euros de bénéfice en France, ils sont allés les chercher dans nos poches", s'agace-t-il, estimant que les ristournes sont de la "poudre aux yeux".

"Ce sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain"

Géraldine, agent immobilier, comprend tout de même que TotalEnergies puisse faire des profits. "Ce ne sont pas des marchands d'armes non plus", note-t-elle. "S'ils cessaient d'exister, ce serait problématique aussi. Je ne suis pas plus choquée que ça".

"Je ne comprends pas trop la réaction négative de la plupart des gens et des médias. Les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain", argumente de son côté Francis Duseux, expert pétrolier, et ancien président de l'UFIP. Il est d'ailleurs persuadé que ce sont grâce aux profits des géants pétroliers que la transition énergétique permettra de s'accélérer pour un avenir plus vertueux.

L'éditorialiste économique Emmanuel Lechypre estime également qu'il faut toujours se réjouir quand une entreprise française va bien. "On ne peut pas se permettre d'avoir un géant de l'énergie qui soit faible", juge-t-il.

Vers de nouvelles ristournes?

Dans l'immédiat, TotalEnergies se dit tout de même prêt à envisager de nouvelles ristournes sur le prix à la pompe. "Si le litre de gazole dépasse deux euros, TotalEnergies pourrait mener de nouvelles actions ciblées de rabais à la pompe." Voilà ce qu'a annoncé le PDG du groupe Total Energies, Patrick Pouyanné, dans les colonnes du Parisien. Le gouvernement "accueille favorablement" cette volonté, a assuré Olivier Véran à l'issue du conseil des ministres mercredi. Un coup de pouce suffisant pour atténuer la polémique?

J.A.