Carburants: la grande distribution s'oppose à la vente à perte

Alors que le patron de Total Patrick Pouyanné a déjà écarté la possibilité de descendre sous le plafond d'1,99 euro le litre, la grande distribution dit également non à la vente à perte du carburant dans ses stations-service. Intermarché, Système U, Carrefour et Leclerc étaient à Bercy ce mardi pour indiquer ne pas être prêts à subventionner la baisse du prix du carburant. Lors d'une audition devant la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale, le PDG de Carrefour Alexandre Bompard a confirmé que son groupe "ne vendra pas à perte".
L'interdiction "de la revente à perte est un principe très important du commerce depuis 1963", a assuré celui qui est aussi président de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), qui représente une grande partie du secteur, ajoutant qu'"il ne faut pas ouvrir cette boîte de Pandore".
Philippe Michaud, co-président du groupement E.Leclerc, et Thierry Cotillard, président des Mousquetaires/Intermarché, ont également affirmé qu'ils ne feraient pas de vente à perte. Dominique Schelcher, PDG du 4e acteur du secteur Système U, a lui indiqué ne pas prévoir "de faire massivement des opérations de vente à perte".
Les enseignes préfèrent donc s'en tenir à vendre leur carburant à prix coûtant, comme elles font depuis des mois. Et une décision plutôt heureuse, estime Frank Rosenthal. Cet expert de la grande distribution voit dans ce refus de la vente à perte une bonne nouvelle pour le caddie.
“Ce n’est pas souhaitable parce que s'ils le font, il ne faut pas se tromper, ils vont se rattraper sur d'autres produits. Ce n'est quand même pas bien en période d'inflation de faire un geste sur l'essence d'un côté et de l'autre augmenter les prix, alors que les distributeurs n'y sont pour rien sur l'envolée des prix du carburant”, explique-t-il.
Le gouvernement persiste
Les remises spéciales sur le carburant ont creusé la dette, ajoute-t-il. Le gouvernement cherche donc à les remplacer par les distributeurs. “Ce n'est pas à eux de le faire! On leur demande, alors qu'ils sont à marge zéro, de perdre de l'argent, donc évidemment ils disent non. Entre préserver le pouvoir d'achat des Français et financer le pouvoir d’achat des Français, il y a une différence. À l'Etat de trouver une solution pérenne”, appuie-t-il. Et le patron d'une grande enseigne glisse: la vente à perte, c'est possible "par-ci par-là, mais pas sur six mois".
Le gouvernement a invité ce mercredi les distributeurs de carburant à "participer" à l'"effort collectif", alors que plusieurs d'entre eux ont affirmé ne pas vouloir mettre en oeuvre la vente à perte que l'exécutif entend autoriser pour faire baisser les prix à la pompe. "Chacun doit et peut faire un effort", a déclaré le porte-parole du gouvernement Olivier Véran devant la presse après le Conseil des ministres, en défendant la mesure malgré l'accueil négatif des distributeurs.