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Faut-il taxer le sucre? "Son impact dépasse de très loin ce qu’il se passe dans nos assiettes"

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Alors que l’Institut Montaigne propose de taxer les produits sucrés, l’éditeur et écrivain Arthur Chevallier retrace ce vendredi sur RMC l’histoire d’une grande passion qui a eu énormément d’impact sur la société.

Avec le sucre, nous nous sommes tant aimés... Le sucre, ce sont les desserts, les bonbons, le vin, tout ce qui nous fait plaisir, tout ce qui de près ou de loin ressemble à une récompense. Mais tout ça, c’était avant.

Dès le XVIIe siècle, des savants remarquent que les gens qui mangent trop de sucre ont les dents pourries. Mais c’est au XXe siècle que le problème est pris au sérieux. Dans les années 1940, des médecins s’inquiètent d’en voir partout, et surtout dans ce que consomment les enfants, qui buvaient des sodas et mangeaient des céréales bourrées de sucre au petit-déjeuner.

On s’est bien inquiétés, et comme d’habitude, on n’a rien fait. Le résultat est là. Une civilisation d’obèses. En 2009, la consommation de sucre au niveau mondial était de 154 millions de tonnes. Aujourd’hui, elle est de 180 millions, avec des perspectives à la hausse. Alors, il faut tempérer ces chiffres car la population augmente. Mais le sucre a sa part de responsabilité.

La matinale 100% info et auditeurs. Tous les matins, Apolline de Malherbe décrypte l'actualité du jour dans la bonne humeur, avec un journal toutes les demies-heures, Charles Magnien, le relais des auditeurs, Emmanuel Lechypre pour l'économie, et Matthieu Belliard pour ses explications quotidennes. L'humoriste Arnaud Demanche vient compléter la bande avec deux rendez-vous à 7h20 et 8h20.
L'avis tranché d'Arthur Chevallier : La France et le sucre, je t'aime, moi non plus - 18/10
2:52

Quand est-ce que le sucre est arrivé dans nos vies?

Suivre l’histoire du sucre, c’est suivre l’histoire de l’Occident. A l’origine, c’est produit en Inde et consommé dans le monde arabe. Les Européens ne le découvrent qu’au XIe siècle. Les chevaliers des croisades le rapportent en Europe. C’est un produit de luxe, une sorte d’épice. Et qui passe pour avoir des vertus médicinales. La consommation se généralise au XVe siècle. Ça traverse même un océan, puisque Christophe Colomb l’apporte en Amérique. Et à partir du XVIe, c’est le boom. Tout le monde se gave.

Problème: le sucre, ça pousse mieux dans les îles. Il faut bien répondre à la demande. Et c’est là que la mauvaise partie de l’histoire commence. Du XVIIe au XVIIIe, près de la moitié des esclaves déportés le sont pour travailler dans les plantations des colonies européennes. Le Portugal fait ça au Brésil, la France et l’Angleterre aux Antilles. Et ce qui met un terme à cette concurrence monstrueuse, c’est l’industrialisation du sucre de betterave au début du XIXe siècle en France. Désormais, plus besoin d’île, on peut faire ça chez soi ou presque. Ça aura une importance dans l’abolition de l’esclavage en Europe au courant du XIXe.

L’impact du sucre dépasse donc de très loin ce qu’il se passe dans nos assiettes. Mais nos assiettes racontent aussi quelque chose de la société. Le sucre est devenu le symbole de la malbouffe pour les classes populaires. Dans les supermarchés, moins c’est cher, plus c’est sucré. Dans la gastronomie, c’est le mouvement inverse. En ce moment, le comble du chic dans les restaurants, c’est de désucrer les desserts! On aura tout vu…

Arthur Chevallier