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La "Grande Démission" ou la quête de sens des travailleurs français

7% de la population active a posé sa démission depuis un an. Entre quête de sens dans son travail et équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, RMC a rencontré celles et ceux qui ont fait ce choix de vie.

Les Américains ont appelé ce phénomène la "Grande Démission". Depuis le printemps 2021, un salarié américain sur trois a démissionné. Ce phénomène massif et sans précédent a soulevé beaucoup de questions sur notre nouveau rapport au travail, après la période Covid.

La France n'est pas épargnée. Les derniers chiffres du ministère du Travail montre que les démissions continuent d'augmenter dans l'Hexagone pour le cinquième trimestre consécutif. Elles atteignent un niveau inédit, supérieur de 20 % à celui de fin 2019. En France, on estime que 7% de la population active a démissionné depuis le printemps 2021.

"C'est une mise en danger"

Mathias, a 32 ans. Il occupait un poste au service communication d'un grand bailleur social en région parisienne. "C'était un "taf" de bureau, pas une passion qui me stimule. Je me suis vu dans cinq ou dix ans toujours là, dans un confort, en regrettant d'être resté", raconte-t-il. Ce travail n'avait plus aucun sens pour lui et il a démissionné la semaine dernière, du jour au lendemain.

"Ce n'est pas particulièrement censé, c'est une mise en danger, mais je ne regrette pas de l'avoir fait", explique-t-il.

Une quête de sens

Ces personnes qui quittent leur travail veulent redonner du sens à ce qu'ils font mais aussi trouver un meilleur équilibre entre vie personnelle et vie profesionnelle peut être le moteur de ces démissions soudaines. "En dehors de ma vie professionnelle, certains aspects comme la famille ou la vie amoureuse avaient du mal à bouger. Toujours le sentiment que le boulot dévore l'énergie que je peux investir ailleurs, comme les projets artistiques." explique Clément, 31 ans, qui a quitté l'agence d'architecture dans laquelle il travaillait depuis 4 ans.

"Des heures supplémentaires toutes les semaines, des nuits blanches, du travail le week-end: je me laissais dévorer par mon boulot"

Ces jeunes démissionnaires ont envie de redonner du sens à leur travail et de ne plus sacrifier vie personnelle. Mais il ne faut pas y voir un moindre engagement dans le travail. Vincent Meyer, enseignant chercheur à l'école de Management de Normandie estime que ces personnes ne sont pas désengagées mais que la manière de travailler a changée:

"On travaille plus qu'il y a 30 ou 40 ans et on a une manière de travailler différente. On est extrêmement sollicités: on lit nos e-mails le soir, le week-end. On est envahis d'outils et les gens ont besoin de retrouver un équillibre entre vie pro et personnelle."

Vincent Meyer insiste également sur le fait que les études montrent très bien que ces salariés qui démissionnent ne le font pas pour se la couler douce, mais bien pour retrouver un travail qui a plus de sens.

Inquiétude chez les recruteurs

Cette vague de démission commence à inquiéter les recruteurs. Des secteurs connaissent de véritables pénurie de main d'oeuvre comme l'hotellerie-restauration ou les métiers de la santé. Pour garder leurs salariés ou attirer de nouveaux candidats, les entreprises doivent proposer plus qu'une rémunération.

"Dans les leviers d'engagement et d'épanouissement du collaborateur, il y a la rémunération mais aussi l'organisation du travail: le télétravail, etc. et le sens du travail, pour s'épanouir. Il faut une aventure humaine", juge Pascal Grémiaux, fondateur d'Eurécia, PME toulousaine spécialisée dans les solutions RH et le bien-être au travail.

Pour lui, vous l'aurez compris, ce phénomène de grande démission peut et doit permettre à l'entreprise de se réinventer et de repenser le pacte social et moral qui les unit à leurs salariés.

Marie Régnier (avec MM)