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Réforme de l'assurance-chômage: "Injuste et inefficace", selon les syndicats

Le gouvernement a présenté mardi une vaste réforme de l'assurance chômage durcissant les règles d'indemnisation, renforçant l'accompagnement des chômeurs et frappant au portefeuille les entreprises abusant des contrats courts, une réforme immédiatement brocardée par les syndicats qui ont fait part de leur "colère".

Objectif: 3,4 milliards d'euros d'économie d'ici 2021 pour désendetter l'Unedic. Edouard Philippe et la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, ont présenté la réforme de l'assurance-chômage. Les grandes lignes: un durcissement des règles d'indemnisation, un renforcement de l'accompagnement des chômeurs et un bonus-malus pour les entreprises abusant des contrats courts.

Il faudra désormais avoir travaillé 6 mois sur les 24 derniers mois pour être indemnisé, alors que c'est seulement 4 mois sur les 28 derniers mois aujourd'hui. Autre durcissement: ceux qui gagnent plus de 4500 euros bruts par mois verront leur allocation baisser de 30% à partir du 7e mois de chômage, mais les 57 ans ou plus sont exclus de cette dégressivité.

Mesures appliquées dès le 1er novembre

Enfin, la règle de calcul des indemnités va être revue: les plus précaires, ceux qui multiplient les contrats courts toucheront moins mais sur une plus longue période. Toutes ces mesures s'appliqueront progressivement partir du 1er novembre, uniquement pour les nouveaux inscrits, donc si vous êtes déjà au chômage, sauf cas particulier, vous n'êtes pas concerné.

Des mesures immédiatement fustigées par les syndicats auxquels elles ont été présentées juste avant la conférence de presse du gouvernement, les partenaires sociaux ayant été tenus à l'écart des arbitrages. 

Laurent Berger (CFDT) les a qualifiées de "profondément injustes" et "extrêmement dures" pour les personnes précaires alternant périodes d'emploi et de chômage. Et la réforme ne "responsabilise qu'en partie" les entreprises "qui usent et abusent de la précarité", selon lui. 

Catherine Perret (CGT) a jugé la réforme à la fois "inique" et "inefficace". "Il y a un chômeur sur deux qui est indemnisé. Avec la réforme du gouvernement, c'est un sur trois", a-t-elle calculé. 

7 secteurs concernés par le bonus-malus

Côté bonus-malus, ce sont les 7 secteurs les plus gourmands en contrats courts qui seront touchés: l'hôtellerie-restauration, l'agroalimentaire et les transports, notamment. Le BTP et la santé ont été épargnés. Dans chacun de ces secteurs, les entreprises qui utilisent plus de contrat courts que la moyenne recevront un malus, c'est à dire qu'elles payeront un surplus de cotisation, jusqu'à 1% supplémentaire sur la totalité de leur masse salariale.

A l'inverse, les entreprises vertueuses bénéficieront d'un bonus, d'une remise sur leur cotisation, jusqu'à 1% en moins sur la totalité de leur masse salariale. Les grandes entreprises qui utilisent beaucoup d'intérimaires seront concernées, pas les TPE de moins de 11 salariés. Ce dispositif ne rapportera rien à l'Etat puisque les malus serviront à financer les bonus.

Là, c'est le patronat qui grince des dents. Geoffroy Roux de Bézieux (Medef) a regretté une mesure "inefficace qui découragera l'emploi". Pour François Asselin (CPME), "un employeur va réfléchir à deux fois" avant d'embaucher. 

Après l'échec des négociations entre patronat et syndicats cet hiver, c'est la première fois depuis 1982 que l'Etat redéfinit seul les règles d'indemnisation. Les derniers changements étaient entrés en vigueur à l'automne 2017.

Victor Joanin avec Paulina Benavente