Lancée depuis près d'une semaine, où en est l'incursion ukrainienne en Russie?

Après des mois de recul face aux soldats russes sur son front Est, l'Ukraine a lancé le 6 août 2024 la plus grande attaque transfrontalière contre la Russie depuis le début de l'assaut russe sur son territoire en février 2022. C'est aussi la plus grande offensive d'une armée étrangère sur le sol russe depuis la Deuxième Guerre mondiale.
"Des milliers" de soldats ukrainiens y participent, a confié à l'AFP dimanche 11 août un haut responsable ukrainien du secteur de la sécurité, s'exprimant sous couvert d'anonymat. Le but, selon lui, est "d'étirer les positions de l'ennemi, de lui infliger des pertes maximales, de déstabiliser la situation en Russie (...) et de transférer la guerre sur le territoire russe".
1.000 km² revendiqués
Le commandant de l'armée ukrainienne, Oleksandre Syrsky, a revendiqué le contrôle par ses troupes de près de 1.000 km² de territoire en Russie, soit bien davantage que ce qui a été reconnu par les autorités russes. "Nous continuons à mener des opérations offensives dans la région de Koursk", a-t-il annoncé devant le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Dans la région de Koursk, à ce stade, 28 localités sont passées sous contrôle ukrainien, a reconnu le gouverneur par intérim, Alexeï Smirnov. Selon lui, les gains ukrainiens s'étendent sur une zone de 40 km de largeur et de 12 km de profondeur, donc bien moins que les 1.000 km² revendiqués par le commandant ukrainien.
Plus de 120.000 évacués
D'après Alexeï Smirnov, au moins 12 civils ont été tués et 121 autres blessés, "dont 10 enfants", au cours de l'incursion de l'armée ukrainienne. Face à cette situation, les autorités russes ont ordonné ce lundi de nouvelles évacuations de civils dans la région de Koursk, mais aussi dans celle voisine de Belgorod, toutes les deux frontalières de l'Ukraine. "À ce jour, 121.000" personnes "sont parties ou ont été évacuées" de celle de Koursk, a détaillé Alexeï Smirnov.
À Moscou, l'aide aux déplacés s'organise depuis plusieurs jours. Sur des routes de la région ukrainienne de Soumy (nord), en face de celle de Koursk, des journalistes de l'AFP ont vu dimanche des dizaines de blindés ukrainiens marqués d'un triangle blanc qui sert manifestement à identifier les troupes prenant part à l'attaque en Russie. Dans ce contexte, les autorités ukrainiennes ont déjà demandé l'évacuation d'au moins 20.000 civils de cette région frontalière.
Un revers inattendu sur le front
"La tâche principale du ministère de la Défense est d'expulser l'ennemi de nos territoires", a déclaré pour sa part le président russe Vladimir Poutine ce lundi 12 août lors d'une réunion avec des responsables des forces de sécurité. Pour lui, c'est un revers inattendu tant son armée a l'avantage depuis plusieurs mois sur le front oriental en Ukraine, grignotant petit à petit du terrain, sans toutefois réaliser de percée majeure. L'armée russe a d'ailleurs revendiqué ce lundi la capture du village de Lissitchné, dans l'Est de l'Ukraine.
Dans son message quotidien dimanche, Volodymyr Zelensky a lui assuré que l'offensive de Koursk était "une question de sécurité" pour l'Ukraine en raison des frappes russes visant son territoire. Il a aussi appelé une nouvelle fois les Occidentaux à autoriser l'usage de missiles à longue portée pour frapper le territoire russe. "La Russie doit être forcée à la paix", a-t-il dit.
Une offensive à des fins de négociations
Pour Volodymyr Zelensky, dont le pays reste occupé à près de 20% par la Russie, l'objectif de l'assaut surprise dans la région de Koursk est clair: "déplacer la guerre sur le territoire de l'agresseur" russe.
L'armée ukrainienne cherche à "semer la discorde dans notre société", a fustigé Vladimir Poutine, accusant Kiev d'"exécuter la volonté" des Occidentaux. "L'ennemi cherche à améliorer sa position de négociation à l'avenir", a-t-il aussi estimé.
Selon le responsable ukrainien interrogé par l'AFP, l'incursion visait également à alléger la pression sur l'armée ukrainienne dans le Donbass (Est), où les troupes russes progressent depuis le début de l'année. Tôt ou tard, la Russie va "arrêter" les unités ukrainiennes dans la région de Koursk mais, si "au bout d'un certain temps, elle n'arrive pas à reprendre ces territoires, ils pourront être utilisés à des fins politiques", par exemple, lors de négociations de paix, a-t-il également jugé.