"Expliquez-nous": le livre surprise d'Alexandre Benalla
Non rien de rien, il ne regrette rien. Alexandre Benalla semble surtout n’avoir toujours pas compris ce qu’on lui reproche. Pourtant, des juges d’instruction lui ont clairement dit et l’ont mis en examen trois fois, pour violence en réunion, ou violences volontaires. Tout le monde sait de quoi il s’agit, de l’arrestation violente d’un couple de manifestants place de la contrescarpe le 1er mai 2018. Et des arrestations de deux autres manifestants le même jour au jardin des plantes. Tout cela en portant des insignes de policier alors qu’il était là en observateur, et qu’il occupait le poste de chef adjoint du cabinet du président de la République. Il se trouve que j’étais là ce jour-là, à Austerlitz puis a la contrescarpe et que comme tous les journalistes, j’avais été intrigué par ce policier qui semblait très agité et qui se comportait comme un patron.
Un an et demi plus tard, il donne donc sa version dans un livre: Ce qu'ils ne veulent pas que je dise. Il parle d’un échange un peu vigoureux avec deux agresseurs de policiers. D’une vidéo qui le montre “aux prises” avec deux personnes usant de la contrainte nécessaire, sans violence gratuite. Je ne regrette pas d'être intervenu, dit-il, même si j’aurai pu faire ce que font 99% des gens qui assistent à une agression dans le métro, regardez ailleurs. Vous l’avez compris, ce n’est pas un lâche lui. Il ne regarde pas ailleurs, il n’a fait que son devoir.
Il se dit victime d’un complot ourdi par les policiers. Parce qu’il avait été chargé de revoir l’organisation de la sécurité de l'Elysée et du président, une sécurité assurée par des policiers et des gendarmes. Il préconisait de rassembler tout le monde sous une seule autorité. Il écrit qu’il était légitime pour cette mission.
“Je crois avoir une bonne vision des choses, j’ai la connaissance du monde de la sécurité, et une large expérience du terrain”. Fin de citation. Il oublie de préciser qu’il avait 26 ans à ce moment-là. À l’entendre, les policiers qui ne voulaient pas de sa réforme, ont donc profité de l’affaire de la vidéo pour le faire tomber en fournissant des dossiers clefs en main à plusieurs journalistes jusqu'à ce que Le Monde sorte finalement l’affaire. Un haut gradé de la police aurait dit: “on le tient” en découvrant les images.
Le couple Macron épargné
Alexandre Benalla règle aussi ses comptes avec les fonctionnaires et les politiques. Il cible les préfets, les directeurs de cabinet qu’il appelle les hommes en gris et dont la spécialité est de ne surtout rien faire. Les plus tordus étant les gens de Bercy.
Il dénonce ceux qui utilisent le pouvoir pour eux, qui en sucent la moelle, s'octroient des privilèges, s’accordent des passes droites. Sur les politiques, il dit avoir vu leur lâcheté, leur médiocrité, il les a vu courber l’échine. Ses attaques se concentrent sur deux piliers de l’Elysée : le directeur de cabinet Patrick Strzoda. “Il n’a jamais d’avis. Il n'obéit pas aux directives d’Emmanuel Macron". Quant au chef de cabinet, François Xavier Lauch, il l’appelle Harry Potter et ne semble pas beaucoup le respecter non plus.
Les deux seuls qui sont épargnés, ce sont Brigitte et Emmanuel Macron.
Des révélations sur l'enterrement de Johnny Hallyday
Mais que dit-il sur les autres affaires qui lui sont reprochées notamment le coffre-fort qui a disparu, les contrats avec les oligarques russes ? Selon lui, ceux sont de fausses affaires. Le coffre-fort que l’on n’a pas retrouvé chez lui, il avait demandé à un ami de le déplacer. Il ne contenait que trois armes qu’il a remis à la justice, ensuite le coffre est resté porte ouverte chez une amie, puis il l’a offert à un autre ami.
Les contrats russes, les voyages en Afrique, ses relations avec des hommes d’affaires très sulfureux, tout cela n’a rien de louche. Ce sont des histoires d’amitiés.
Finalement la révélation du livre, c’est le récit de l'enterrement de Johnny. Comment le manager du chanteur a envoyé une épaisse liasse de factures à l’Elysée. Il voulait se faire rembourser les fleurs, les nuits d'hôtel des invités, les restaurants, et même le cercueil. C’est Alexandre Benalla qui lui a fait savoir qu’il n’en était pas question. Le manager a rappelé plusieurs fois, lui a dit qu’il le ruinait. Mais Benalla est resté ferme.